DEUXIÈME CONGRÈS DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE : TOURS 1920
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, dimanche 9 mai 1920
P. 188
INFORMATIONS DIVERSES
Le congrès agricole de Tours
Le deuxième congrès de l'agriculture française se tiendra à Tours, les 29, 30 et 31 mai prochains.
M. le président de la République et le ministre de l’Agriculture ont bien voulu lui accorder leur haut patronage.
Au programme :
1º Moyens propres à développer la constitution des foyers ruraux ;
2º Élection et rôle des chambres d'agriculture ;
3º Comment intéresser le personnel ouvrier aux bénéfices de l'exploitation agricole ;
4º Bénéfices agricoles et participation de l'agriculture aux charges publiques.
Un banquet sous la présidence de M. Ricard, ministre de l’Agriculture, aura lieu le le dimanche 30 mai, salle des fêtes de l'hôtel de ville.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, samedi 22 mai 1920
P. 209
TOURS
CONGRÈS DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE
Les 29, 30 et 31 mai
Au lendemain de la grande guerre, pour surmonter les difficultés de toutes sortes qu'ils rencontraient dans leur exercice de leur profession, les agriculteurs de toute la France éprouvèrent le besoin de s'unir.
Le premier congrès de l'agriculture française, tenu à Paris, en 1919, leur en fournit l'occasion : la Confédération nationale des Associations agricoles, la C.N.A.A. y fut créée. Des fédérations régionales serviront de lien entre toutes les associations locales et ce grand mouvement d'union permit enfin aux agriculteurs de se faire entendre.
Le deuxième congrès national de l'agriculture sera la consécration des résultats déjà obtenus et marquera une nouvelle étape dans l'organisation corporative du monde rural.
Le ministre de l'Agriculture, M. Henri Ricard qui est, ne l'oublions pas, le fondateur de la C.N.A.A., et le défenseur de nos associations, d'éminentes personnalités agricoles, M. Jules Gauthier, MM. Méline, Viger, Sagnier, Hitier, de Vogüé, Fernand David, assisteront ou prendront part aux travaux du congrès.
Le choix de Tours ne peut que nous honorer ; il provient de la part que les ruraux de notre région ont prise dans le mouvement de défense économique agricole qui a déjà porté ses fruits.
Mais il implique pour les agriculteurs du Centre l'obligation de venir prendre part nombreux aux discussions du congrès.
"Parlottes, diront quelques esprits chagrins. Les résultats déjà obtenus en ce qui concerne le transport des engrais, la politique du blé, la question des impôts ruraux... prouvent qu'on ne s'est pas contenté de parlottes. Il faut évidemment se concerter, se mettre d'accord avant d'agir auprès des pouvoirs publics.
Il faut, aussi, comme le font les autres corporations, proclamer le rôle que nos paysans entendent jouer. On peut être assuré que cette action professionnelle ne tient, en définitive, qu'à augmenter la production, et à relever la France par le travail, dans la paix sociale.
Que les agriculteurs se donnent rendez-vous à Tours les 29, 30, 31 mai. Ils éprouveront, au retour, l'impression qu'ils ont, en affirmant leur union corporative, servi une fois de plus les intérêts du pays, sans négliger les leur.
P. GARNIER,
Secrétaire général de la Fédération des Associations agricoles du Centre.
1920
P.215
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, mercredi 26 mai 1920
LES PROPOS D'UN PAYSAN
Les grandes assises nationales de l'agriculture à Tours
Le 2e congrès national de l’agriculture qui va être tenu à Tours du 29 au 31 mai courant, aura, qu’on ne l’ignore pas, les allures d’un évènement économique de premier ordre ; il réunira dans notre ville plusieurs centaines de délégués venus de toutes les régions de la France, tant agricoles que viticoles, dans le but déterminé d’étudier les questions dont l’examen doit améliorer la production de nos terres, de favoriser la classe agricole dans son écrasante mission et de travailler à la renaissance du pays.
Il ne s’agit que de cela en effet : la remise en état d’équilibre d’une situation profondément troublée, la lutte contre les éléments de toutes sortes qui sont les facteurs les plus puissants de la vie chère.
La question, comme on le voit, mérite qu’on s’y arrête, elle est vitale, elle commande la participation de tous. C’est pourquoi il semble utile d’appeler l’attention des agriculteurs de tous ordres, propriétaires de domaines, propriétaires exploitants, fermiers, métayers et ouvriers agricoles, sur cette manifestation organisée en leur faveur afin qu’ils ne lui ménagent pas leur concours.
Sa portée est encore plus haute : elle s’adresse à la population tout entière, même celle des villes qui, souvent, se montre trop indifférente devant la tâche des campagnes et ne songe pas assez que son intérêt direct est de faire cause commune avec elles. En dehors de la grande et belle moralité qui de dégage de l’idée de fraternité entre les travailleurs et entre les classes sociales pour conquérir le bien de tous dans une période où la collectivité en a un si pressant besoin, il faudrait que chacun fût bien convaincu que la mission de restaurer nos cultures, de les favoriser dans la plus large mesure du possible est la plus lourde de toutes celles qui incombent à un pays très malheureux quoique vainqueur.
Les industries diverses ne fournissent pas au cultivateur les moyens de mettre la terre en valeur comme il conviendrait, ni en quantité suffisante ; au moment où il entend dire hautement autour de lui, qu’il s’enrichit trop, il voit toute la jeunesse environnante même celle des familles d’exploitants quitter le sillon, sous prétexte qu’on n’y gagne pas sa vie. Enfin cette désertion de la terre raréfie la main-d’œuvre, et il en résulte que le paysan travaille selon les saisons de 10 à 16 heures par jour pour regagner des pertes irréparables sans songer à se plaindre.
Et pourtant a-t-on pensé à ce qui se produirait si l’homme de la terre fléchissait dans ses énergies ?
La tâche des agriculteurs est dons la plus lourde et elle s’accroît souvent du mépris qu’il récolte bien avant son blé et son vin.
Soyons compatissants pour celui qui n’a jamais failli à son devoir social : aidons-le et soyons convaincus qu’en agissant ainsi nous nous aiderons nous-mêmes.
Montrons-nous accueillants pour tous ces hommes dévoués qui vont franchir parfois des centaines de kilomètres pour venir défendre nos intérêts et nos droits dans les grandes assises agricoles que la ville de Tours aura l’honneur de voir s’ouvrir samedi prochain, avec le concours de toutes les hautes personnalités agricoles et officielles, sous la présidence de M. Ricard, ministre de l’Agriculture.
L’ordre du jour annonce le plus grand intérêt ; dans les sections diverses on étudiera comment on pourra développer les foyers ruraux, l’élection et le rôle des chambres d’agriculture ; la participation de ouvriers aux résultats de l’exploitation agricole ; les bénéfices agricoles et la participation de l’agriculture aux charges publiques.
Ce programme démontre l’importance du congrès ; appelons donc à nous tous ces servants et ces praticiens qui viendront travailler pour nous ; saluons-les, à leur arrivée, en une saison où les frondaisons printanières auront mis partout leur parure, et que la plus belle fleur du jardon de la France soit le sourire de ses populations.
Auguste CHAUVIGNÉ
Secrétaire perpétuel de la Société d'agriculture, sciences, arts et Lettres d'Indre-et-Loire
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, jeudi 27 mai 1920
p. 217
TOURS.
Le Congrès de l’agriculture française
Deux excursions doivent être organisées, la première, le lundi 31 mai à Vouvray, et la seconde, le mardi 1er juin, pour la visite des châteaux de Touraine avec déjeuner à Chinon.
Le prix de l’excursion à Vouvray est de 5 francs, celui de la visite des châteaux est fixé à 60 francs.
Prière de se faire inscrire à la permanence du Congrès, hôtel de ville de Tours.
***
Les membres des Associations agricoles et viticoles du département d’Indre-et-Loire qui désireraient assister au banquet du congrès qui aura lieu sous la présidence de M. Ricard, ministre de l’Agriculture, le dimanche 30 mai à midi et demi, salle des fêtes de l’hôtel de ville de Tours, sont priés d’envoyer de suite leur adhésion à la mairie de Tours.
Le prix de la carte est fixé à 25 francs.
***
Les personnes ayant des chambres disponibles et qui voudraient les mettre à la disposition des délégués du Congrès de l’agriculture française sont priés de la faire savoir de suite à la mairie de Tours en indiquant les prix.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, vendredi 28 mai 1920
p. 219
TOURS.
Le Congrès de l’agriculture française
Deux excursions doivent être organisées, la première, le lundi 31 mai à Vouvray, et la seconde, le mardi 1er juin, pour la visite des châteaux de Touraine avec déjeuner à Chinon.
Le prix de l’excursion à Vouvray est de 5 francs, celui de la visite des châteaux est fixé à 60 francs.
Prière de se faire inscrire à la permanence du Congrès, hôtel de ville de Tours.
***
Les membres des Associations agricoles et viticoles du département d’Indre-et-Loire qui désireraient assister au banquet du congrès qui aura lieu sous la présidence de M. Ricard, ministre de l’Agriculture, le dimanche 30 mai à midi et demi, salle des fêtes de l’hôtel de ville de Tours, sont priés d’envoyer de suite leur adhésion à la mairie de Tours.
Le prix de la carte est fixé à 25 francs.
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Les personnes ayant des chambres disponibles et qui voudraient les mettre à la disposition des délégués du Congrès de l’agriculture française sont priés de la faire savoir de suite à la mairie de Tours en indiquant les prix.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, samedi 29 mai 1920
p. 220-221
TOURS,
Le Congrès des agriculteurs français
Les viticulteurs
Comme entrée au Congrès des agriculteurs, nous assistons aujourd’hui à une réunion des viticulteurs.
Cette réunion a été parfois agitée, mais enfin, tout au moins, dans la matinée, elle a fini par obtenir l’approbation générale de l’assemblée.
Tout d’abord M. Germain, président de l’Union de l’Union tourangelle ouvre la séance.
Il est décidé que M. Ferroul cède la place à M. Coste (du Gard), comme président.
Au bureau figurent MM. Gautier, président du Congrès ; Combemale, Savot, Chauvigné (Indre-et-Loire) ; Élie Bernard, secrétaire général, : M. Philbert, de la Champagne viticole délimitée.
Le congrès décide son affiliation à la C.N.A.A.
M. Chauvigné (Indre-et-Loire) est désigné comme délégué ainsi que M. Perrin (Gironde) comme deuxième délégué à la C.N.A.A.
Une question se soulève au sujet des chambres d’agriculture.
Doivent-elles être départementales ou régionale ?
La Fédération du Sud-Est propose des chambres régionales dont l’une aurait Tours pour siège.
M. Riboux, au nom de la Fédération du Sud-Est, explique la façon dont le vote serait institué, grâce à la participation des syndicats agricoles.
M. Chauvigné (Indre-et-Loire) demande la participation au vote des sociétés d’assurances agricoles et des mutuelles agricoles.
M. Perrin propose le maintien des chambres d’agriculture départementales, étant entendu que ces chambres peuvent se fédérer par région.
M. Chauvigné soutient la création des chambres agricoles régionales.
Finalement le congrès vote le principe de la création de chambres d’agriculture régionales.
Mais alors une longue discussion s’engage, longue et vive.
Ces chambres régionales vont-elles supprimer les chambres départementales ?
Ne serait-il pas plus simple de proposer une fédération de chambres départementales ?
Une autre question s’engage sur le rôle que doivent assumer les chambres agricoles.
M. le colonel Mirepoix fait ressortir que le rôle des chambres d’agriculture doit être un rôle identique à celui des chambres de commerce.
Il serait regrettable qu’elles assument le rôle joué actuellement par les fédérations ou les syndicats agricoles.
Les représentants du Sud-Est appuient cette opinion.
L’assemblée vote finalement un vœu fixant la tâche des chambres d’agriculture à une œuvre consultative et à quelques actions directes notamment pour le reboisement, l’assèchement et le remembrement.
Sur proposition du colonel Mirepoix, l’assemblée émet le vœu que les chambres d’agriculture n’interviennent pas obligatoirement dans les conflits de travail.
Elle vote également le privilège de la suppression des offices départementaux.
M. Garcin (du Sud-Est) s’élève contre le système électoral des chambres d’agriculture qui consisterait à créer des « classes » d’agriculteurs, c’est-à-dire des catégories de propriétaires, d’exploitants et d’ouvriers.
L’assemblée émet une motion dans ce sens.
M. Maillac a déposé un vœu tendant à ce que les ouvriers ne soient électeurs qu’autant qu’ils auront un séjour d’au moins une année dans la même commune.
Cette proposition est adoptée.
L’assemblée propose également le principe de la non-éligibilité des fonctionnaires et des élus jusques et y compris les conseillers d’arrondissement.
Le banquet
Vers midi, les membres de la réunion se retrouvent à l’hôtel du Croissant où un excellent déjeuner est servi.
Nous notons comme délégués au congrès de la Fédération :
Confédération des vignerons du Sud-Est. – MM. Gustave Coste, Gaston Collombe, André Pallier, G. Lauriol de Chaussy, Louis Méjan, Paul Villaret.
Confédération des associations viticoles de Bourgogne. – MM. Savot, Châtillon, Dubois, Morel, Boudier, marquis d’Angerville, Hélie, Renaud, Vaudet.
Syndicat de défense des vignerons des côtes du Cher de Montrichard. – MM. Denis, Fatin, Uraine.
Syndicat national des vignerons de la Champagne. – MM. Checq et Rivollier.
Association viticole roaunaise. – M. Chaize.
Syndicat général des vignerons de la Champagne délimitée. – MM. Philbert, Martin, Perrin, Poittevin, député.
Fédération des viticulteurs charentais. – M. Verneuil.
Association syndicale des viticulteurs de Gironde. – M. Audebert.
Confédération générale des vignerons du Midi. – MM. le docteur Ferroul, Combemale, Carcassonne, Jouet, Bernard, Dehan, docteur Guimier, Seguin, de Fourtou, Ravel ; Maillac Georges, Maillac Henri, Burguin, Laffont, Faugère, Maurel, Bausil, colonel Mirepoix.
Citons également : MM. Vavasseur, Houdée, Coubart, Martin, Dr Faré, Carré, président de l’Association viticole de la Sarthe.
À la table d’honneur : MM. Germain, président ; Heurtault, et Verjat, vice-présidents ; Jacopin, trésorier ; M. Gautier, président du congrès ; M. Ferroul, ancien député, président le la C.G.V. ; Poitevin, député de la Marne.
M. Grosjean, représentant le maire de Tours.
M. Germain prend le premier la parole.
Nous publierons son discours ultérieurement.
M. Coste, le nouveau président, remercie l’assemblée de l’accueil des viticulteurs.
Il signale la solidarité des vignerons dont le travail constitue une base financière sur laquelle l’État peur compter.
Il fait appel à la solidarité et renouvelle ses remerciements.
M. Gautier qui préside l’association reconnaît la responsabilité très grande qu’il assume en ce qui concerne la surveillance des associations.
Il dit que c’est le Midi qui a eu le mérite de voir le péril ainsi d’ailleurs que la C.G.V.
M. Ferroul fait un exposé humoristique de la création de la C.G.V.
Il est fréquemment interrompu par des applaudissements et surtout des rires.
M. Vavasseur fait un appel en faveur des vins de Touraine.
M. Poitevin, député de la Marne, défend les intérêts de tous les viticulteurs.
La séance de l’après-midi est consacrée à l’examen des questions concernant le régime des marcs, le sur pressurage et la diffusion des vins, il est surtout question d’une fraude qui se produit dans certaines conditions.
Une large discussion s’engage sur « l’eau de végétation », c’est-à-dire d’eau qui… améliore le « divin jus » de la treille. Mettons qu’il ne s’agit dans cette discussion que des vins de Champagne.
L’assemblée décide de se ranger à l’avis de l’inspecteur des fraudes.
Et voici la question des « mistelles ». On sait que l’on vend sous ce vocable des moûts qui coûtent meilleur marché en Espagne ou en Grèce qu’en France.
M. Carcassonne, vice-président de la C.G.V. réclame la modification du régime douanier, des mistelles et des vins de liqueur étrangers.
Il propose de porter à 6 francs par degré sut tous les degrés d’alcool acquis ou en puissance contenus dans tous les vins de liqueur ou, mistelle le nouveau droit de douane.
M. Chauvigné (Indre-et-Loire) rapporte la question de la taxe sur les bénéfices agricoles.
Il signale la difficulté qu’il y aura à fixer le bénéfice d’un agriculteur qui généralement ne tient pas de comptabilité.
Il demande donc le maintien du forfait sans coefficient avec élévation du taux, révision décennale de l’évaluation cadastrale et l’égalité proportionnelle de l’impôt foncier.
Le marquis de Palaminy combat le système du coefficient.
M. Ravel demande la suppression des coefficients qui existent déjà e agriculture alors que la commission des finances de la Chambre a voulu copier les coefficients commerciaux qui s’expliquent facilement par la différence des bénéfices faits par suite de la différence des professions : bijoutiers, et marchands d’engrais.
M. Ravel cite alors comme exemple la commune de Tours pour la valeur locative actuelle à l’hectare. Il fournit les chiffres suivants : terres labourables, 314 fr. ; vignes, 400 fr. ; jardins, 445 fr. ; terrains d’agrément, 3 909 fr.
Le Marquis de Palaminy, proteste contre le système des coefficients ; avec des chiffres à l’appui il démontre qu’il est nécessaire de faire une révision décennale de la propriété non bâtie.
Le colonel Mirepoix demande une modification des commissions des chargés d’estimer les coefficients Il réclame que ces commissions aient un nombre de membres égal à celui des fonctionnaires.
M. Riverain insiste sur la nécessité du paiement de l’impôt sur les bénéfices en ce qui concerne les cultivateurs.
Cette proposition se traduit par un vote demandant la « suppression des abattements » en ce qui concerne l’impôt sur le revenu.
L’assemblée émet un vœu tendant à ce que le Sénat maintienne le chiffre de 19 fr. voté par la Chambre.
M. Gautier parle de la journée de huit heures dans l’industrie.
Il indique qu’au mois de janvier prochain il sera question d’appliquer ces principes à l’agriculture, il demande qu’on ouvre une enquête en vue de recueillir les renseignements utiles pour participer au congrès de Genève.
Cette question réglée, on fixe l’assemblée de la Fédération des associations viticoles pour 1921 à Nîmes, avec une réunion à Montpellier, précédant le congrès d’Alger.
La séance est levée.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, dimanche 30 mai 1920
P. 223
Le Congrès des agriculteurs français - Séance d'ouverture
Samedi matin, dans la salle des mariages de l'hôtel de ville a eu lieu la séance d'ouverture du 2e Congrès national de l'agriculture française.
M. Jules Gautier préside, assisté de MM. Fernand David et Victor Borel, anciens ministres de l'agriculture, et de M. Henry Girard, secrétaire général.
Le président souhaite la bienvenue aux congressistes, notamment aux représentants du grand-duché du Luxembourg et de l’Alsace.
En quelques mots heureux, il fait allusion à la grand-croix de la Légion d’honneur que vient de recevoir M. Eugène Tisserand à l’occasion de son 90e anniversaire. Il y a soixante-dix ans que M. Tisserand entra au ministère de l’Agriculture ; on sait qu’il est directeur honoraire de ce ministère, membre de l’Académie des sciences et de l’Académie d’agriculture.
M. Henry Girard, expose ensuite le programme du congrès.
Il explique très heureusement que l’agriculture française doit rester elle-même ; elle se distingue d’ailleurs autant des groupements ouvriers que des groupements patronaux des grandes industries, car elle est étrangère à la lutte des classes.
La solidarité des travailleurs des champs est réellement effective, qu’ils soient patrons ou ouvriers et la preuve c’est que trois fois sur cinq des questions soumises au congrès intéressent les travailleurs agricoles : 1° le confort rural ; 2° les distractions à la campagne ; 3° la participation aux bénéfices.
Il parle ensuite du régionalisme qu’il estime profitable à l’agriculture.
Enfin il annonce que le troisième congrès se tiendra l’année prochaine à Alger, au printemps.
Puis les sections se forment et procèdent au travail qui sera sanctionné demain après-midi, dans la réunion plénière qui se tiendra à 2 heures, au Théâtre-Municipal, sous la présidence de M. Ricard, ministre de l’Agriculture.
***
L’importance su congrès n’a évidemment pas besoin d’être indiquée. Signalons cependant que 511 groupements agricoles et 41 unions ou Fédérations représentant plus d’un million d’agriculteurs sont accréditées au congrès par 950 mandats.
Parmi les délégués, nous avons eu le plaisir de rencontrer : M. Joseph Heinrich, de l’Alsace ; les délégués du grand-duché de Luxembourg ; M. Zanen, directeur du service agricole ; M. Clasen, président de la Confédération des viticulteurs ; M. Kauffmann, président de la Fédération des associations agricoles ; M. Didderich, président de la section luxembourgeoise de la Société nationale d’encouragement à l’agriculture de France, et de m. Leibfried, délégué du Luxembourg à la même société.
Signalons également la présence, dès l’ouverture de la séance de MM. Proust, Bernier et Morin, députés d’Indre-et-Loire, ainsi que de M. le vicomte de Boissard, vice-président de l’Union des viticulteurs de Maine-et-Loire.
En outre, sont présents, les membres du congrès des viticulteurs que nous avons indiqué hier et à ce propos nous regrettons qu’un mot de notre compte rendu ait froissé, paraît-il un certain nombre de délégués. M. le docteur Ferroul a prononcé, en effet un excellent et parfois émouvant discours dont nous avions seulement souligné la partie la plus vivante et la plus applaudie.
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Les travaux des sections
Les délégués réunis dans les diverses sections ont examiné les questions à l’ordre du jour.
Après de longues discussions ils ont rédigé et accepté dans chaque section les vœux suivants qui seront soumis à l’approbation de l’assemblée générale dimanche matin.
1re section. – Foyers ruraux.
Vœux présentés par M. Anglade comme conclusions de son rapport (sur les moyens de développer les foyers ruraux) et adoptés par la 1re section su congrès, sous la présidence de M. le sénateur Fernand David.
1er vœu.
Le congrès considérant que le principe du partage forfait, tel qu’il est établi par notre régime successoral et les restrictions apportées à la liberté de tester entraînent un morcellement des biens fonciers nuisible à l’exploitation familiale et favorable à l’émigration rurale, émet le vœu :
1° Que le testateur ait toujours le droit de laisser à un seul de ses descendants la totalité des immeubles ruraux se rattachant à une même exploitation sans qu’il y ait lieu de considérer si la valeur du legs dépasse la quotité disponible.
2° Que le testateur puisse spécifier que ses immeubles resteraient indivis entre tous ses descendants ou entre plusieurs d’entre eux. L’indivision devant être maintenue si la fin n’en est pas demandée par l’un de ceux qui participent normalement d’une manière effective à l’exploitation du fonds.
Vœu présenté par MM. Guilherme, Bachelet, Descours, Desacres, Bocher, Louis Prous, plusieurs présidents de caisses de crédit-agricole et adopté par la 1re section du congrès de Tours.
Étant donné la nécessité de coordonner et de simplifier les différentes lois sur les crédits agricoles, de faciliter de plus en plus et par tous les moyens d’acquisition de petites propriétés et de réduire le temps nécessaire pour l’allocation des avances aux caisses régionales et aux coopératives.
Le congrès émet le vœu que le projet de loi sur le crédit mutuel et la coopération agricole adopté par la Chambre des députés soit discuté par le Sénat le plus rapidement possible.
2e vœu.
Le congrès considérant que les facilités les plus larges doivent être données au point de vue du crédit aux salariés et petits propriétaires pour l’acquisition, l’aménagement, la conservation et la transformation d’exploitations familiales, émet le vœu :
1° Que les caisses régionales assurent le plus possible leurs opérations à court terme à l’aide des dépôts qu’elles devront rechercher sur place ou auprès des caisses d’épargne, de manière que les avances de l’État soient réservées de préférence aux opérations à moyen terme et mieux encore aux opérations à long terme ;
2° Qu’elles fassent le plus large usage des obligations hypothécaires à ordre ou au porteur pour mobiliser leurs avances ;
3° Que le législateur s’efforce de rendre les sociétés de crédit immobilier utilisables aux agriculteurs par la suppression de la limitation de l’étendue des jardins ou champs susceptibles d’être acquis ; par l’augmentation du maximum de leur valeur, par l’extension de leurs opérations à toutes celles ayant pour objet l’acquisition, l’aménagement, la transformation, la conservation, et la reconstitution des petites exploitations familiales ;
4° Que pour l’acquisition, l’aménagement, la transformation, la conservation et la reconstitution de petites exploitations familiales, les prêts consentis puissent atteindre 40 000 francs.
5° Que les avances puissent être consenties, sans limite au point de vue du chiffre à tout employeur désireux de construire des maisons paysannes pour les employés qu’il emploie ou les domestiques de ferme ;
6° Que des amortissements spéciaux soient accordés suivant le nombre d’enfants.
3e vœu.
Le congrès émet le vœu : que les caisses régionales de crédit recherchent dans l’épargne locale les dépôts dont elles peuvent avoir besoin pour leurs opérations à court terme, que les caisses d’épargne et leurs conseils facilitent dans plus large mesure possible, les opérations des caisses régionales de crédit agricole en leur faisant des avances conformément à l’article 10 de la loi du 20 juillet 1895 et du 23 décembre 1912.
4e vœu.
Le congrès émet le vœu que le projet Boret ayant pour objet de faciliter :
1° L’accession des travailleurs agricoles à l’exploitation et à la propriété pour les anciens combattants et avantages aux familles nombreuses ;
2° que la reconstitution des exploitations agricoles dans les régions dévastées soit mis en discussion le plus rapidement possible.
Le congrès faisant au surplus des réserves sur la priorité accordée aux sociétés foncières dans la vente de certains biens ruraux et émettant le vœu que le Crédit foncier participe à cet effort agraire et s’oriente nettement dans la voie agricole prévue par les statuts dans laquelle ses premiers dirigeant l’avaient résolument entraîné.
2e section. – Chambres d’agriculture.
Les vœux suivants ont été émis :
1° Que les chambres d’agriculture soient régionales, la loi fixant le centre de la région et le nombre de régions, mais laissant aux arrondissements la liberté de s’affilier à telle ou telle région.
2° Que le nombre de régions corresponde au nombre de corps d’armée sous réserve pour l’avenir des modifications qui pourraient être apportées au nombre des régions et à la fixation de leurs centres, sur la demande des groupements agricoles et des délégués des chambres d’agriculture, sans toutefois que le nombre des régions puisse dépasser le nombre de trente.
3° Que les élections aient lieu par scrutin de liste par arrondissement.
4° Que le nombre de délégués soit proportionnel au nombre des inscrits.
5° Qu’il y ait égalité entre le nombre des élus du suffrage universel et le nombre des élus au suffrage corporatif.
6° Que soient électeurs les ouvriers agricoles domiciliés dans la commune depuis deux ans au moins et y exerçant à titre unique ou principal la profession agricole.
7° Que le paragraphe 5 de l’article 8 de la loi du 25 octobre 1919 soit supprimé.
8° Que puissent nommer des délégués les sociétés, syndicats et associations exclusivement agricoles constituées depuis 5 ans au moins et percevant des cotisations effectives de leurs membres, ou ayant des moyens équivalents, tels que caisses de crédit agricoles, mutuelles d’assurance et coopératives de production agricole.
9° Qu’il y ait incompatibilité entre le mandat de membre des Chambres d’agriculture et tout mandat politique, exception faite du mandat municipal, et que cette incompatibilité soit étendue aux fonctionnaires, même propriétaires.
10° Qu’en collaboration étroite avec les Associations agricoles existantes les chambres d’agriculture aient mission d’aider et de subventionner les sociétés agricoles tels que syndicats, mutuelles, coopératives agricoles.
11° Que les Offices agricoles soient supprimés le jour où les chambres d’agriculture entreront en fonction.
3e section. – Participation des ouvriers aux bénéfices agricoles.
On adopte après discussion les conclusions complétées du rapport de M. Hitier et ainsi conçues :
Il y a lieu d’abord d’assure aux salariés agricoles des logements convenables pour eux et leur famille avec un coin de terre pour la culture des légumes et l’entretien de quelques animaux ; mais en même temps, afin de retenir à la ferme les ouvriers, il apparaît d’une bonne politique d’associer à l’intérêt de l’exploitant celui de ses collaborateurs. Mais la participation proprement dite au bénéfice de l’entreprise déjà si difficile à réaliser dans l’industrie, présente en agriculture des obstacles encore plus grands. Elle pourrait même offrir dans bien des cas de graves inconvénients.
Pour intéresser le personnel aux résultats de l’exploitation agricole, le procédé le plus pratique semblerait être d’assurer à l’ouvrier le salaire normal de la région et lui accorder comme supplément :
1° Une prime à la production (prime par quintal de blé, d’avoine, par hectolitre de vin produit, pat animal élevé ou engraissé) ;
2° Une prime d’économie (prime du fait de la diminution des dépenses, tant en ce qui concerne les dépenses relatives au matériel qu’en ce qui concerne les dépenses relatives à la main-d’œuvre, le chef d’exploitation devant en tout état de cause rester le maître incontesté de la direction des travaux).
Toute fois dans un pays comme la France, qui présente une si grande variété de régions naturelles, une variété non moins grande de systèmes de culture, de mode de faire valoir, etc., on ne saurait indiquer de formules générales de participation des ouvriers au résultat de l’exploitation agricole.
Il appartient aux associations agricoles de chaque région, à chaque agriculteur, d’examiner comment, dans son milieu, étant donné les conditions naturelles économiques et sociales, cette participation peut être réalisée.
4e section. – Les bénéfices agricoles et la participation de l’agriculture aux charges publiques.
La résolution suivante présentée par son rapporteur, M. de Marcillac, est adoptée :
Considérant les aléas de l’industrie rurale et les oscillations inévitables des cours des produits agricoles dont le cultivateur ne peut être le maître.
Considérant d’autre part, le rôle joué dans l’économie générale du pays par la terre, par l’exploitant du sol notamment, créateur de richesses et de matières imposables, par la famille terrienne, réservoir d’épargne et gardienne des vertus d’ordre, d’énergie, de travail et de persévérance.
Le congrès déclare :
1° Que le régime fiscal appliqué à l’agriculture doit repose essentiellement sur une base forfaitaire ;
2° Que la productivité des impôts doit être recherchée, moins dans une aggravation des charges ou du taux des impôts frappant la propriété terrienne et son exploitant que dans le développement de la productivité du sol et dans l’accroissement de richesses et de matières imposables qui en découlent.
Les vœux suivants ont été également adoptés :
1° Vœu présenté par M. Seguin, au nom de la C.G.V. tendant à ce que l’équilibre des budgets départementaux ou communaux ne soient pas uniquement réalisé par l’impôt foncier, mais par une égale contribution des diverses cédules ;
2° Vœu présenté par M. de Palaminy au nom des associations agricoles du Sud-Ouest tendant à ce que les coefficients ne soient fixés qu’après consultation des chambres d’agriculture ;
3° Vœu présenté par M. Fernand Laurent au nom de la C.S.A. tendant à ce que dans l’établissement des coefficients il soit tenu compte des variations diverses de la production agricole tant dans l’espace que dans le temps ;
4° Vœu présenté par M. Garcin au nom de l’union du Sud-Est demandant que faculté soit donnée au contribuable de faire la déclaration des modifications intervenues dans la nature de la culture ;
5° Deux autres voeux présentés par M. Garcin sont, en raison de l’étendue des problèmes qu’ils soulèvent, renvoyés,
L’un concernant la détermination des revenus réels en agriculture, au bureau confédéral pour étude,
L’autre concernant le prélèvement sur le capital à l’Assemblé générale du congrès.
6° Motion présentée par M. de Marcillac,
Considérant que l’emploi des coefficients variables par nature de culture appliqué à une propriété foncière dont le nombre de parcelles se compte par millions entraînera pour l’administration un travail considérable et difficile notamment dans les pays de polycultures et de petite culture ;
Émet le vœu qu’au moins pour l’année 1920 soit établi un coefficient moyen pour les domaines de polyculture dont la valeur locative est inférieure à 1 250 francs.
Le banquet des viticulteurs
Voici le texte du discours qui a été prononcé hier au banquet des viticulteurs par M. Germain, conseiller général, président de l’Union vinicole d’Indre-et-Loire :
Messieurs,
Après les désastres dont toutes les familles de nos viticulteurs tourangeaux sont accablées et auxquelles j’ai le devoir d’adresser au nom de la société un bien sincère hommage de condoléances et de sympathie, la plus belle journée de l’Union viticole d’Indre-et-Loire est bien celle qui nous permet par cette belle journée de printemps de recevoir les délégués les plus éminents de la viticulture française ; nous en sommes très honorés et quand la Fédération des Associations viticoles régionales de France nous a fait part de son intention de faire sa réunion générale à Tours à l’occasion du congrès, c’est avec joie que nous avons accepté de la seconder dans l’organisation de cette réunion dans notre belle cité tourangelle.
Vous êtes venus, messieurs, très nombreux, nous vous en remercions et considérons que non seulement vous avez voulu à l’occasion de ce grand congrès venir défendre les intérêts de cette belle et délicieuse production du vin, mais encore vous avez tenu à démontrer combien il était utile de resserrer les liens qui de plus en plus doivent unir tous les producteurs français, confiant dans cette union, et dans l’œuvre générale de la reconstitution nationale, vous êtes venus là pour accomplir cette besogne urgent et essentielle, en étudiant d’une façon aussi minutieuse que pratique, les détails qui doivent nous conduire à des réalisations. Le programme est très étendu, le champ est vaste, la culture doit y être intensive et confiées à des praticiens : beaucoup de question risqueraient de nous voir séparer sans solutions, si des hommes dévoués, passionnée par toutes ces questions importantes des intérêts agricoles, qui suivent pas à pas ses progrès et constatent non sans amertume ses défaillances, ne ménagent ni leur temps ni leurs peines, ne venaient de toutes les parties de la France et malgré les difficultés actuelles apporter le résultat de leurs études et faciliter ainsi le grand travail qui devra s’accomplir à l’occasion du congrès.
C’est dans cette intention messieurs, que vous êtes tous venus chargés de rapports très étudiés et parfaitement conçus, malgré cela, vous avez tenu à les soumettre à l’approbation et à la discussion d’une réunion générale, les viticulteurs tourangeaux vous en remercient et vous sont très reconnaissants d’avoir bien voulu choisir notre ville comme lieu de réunion, nous souhaitons messieurs que votre court séjour parmi nous vous soit agréable et que vous emporterez de la Touraine un bon souvenir.
Je suis très heureux d’avoir l’occasion à ce banquet de vignerons d’adresser, au nom de l’Union vinicole d’Indre-et-Loire à notre sympathique et distingué président M. Gautier d’abord tous nos remerciements pour l’honneur qu’il a bien voulu nous faire en assistant à ce modeste banquet, et de lui dire combien nous avons été heureux de le voir élevé à la présidence de la Fédération nationale agricole, l’agriculture française trouvera en M. Gautier un vaillant défenseur et la Touraine se trouve tout particulièrement favorisée.
Messieurs,
Bien loin des grands crus que représentez, nous ne pouvons avoir la prétention de vous les faire oublier même un instant en offrant à nos palais délicats nos vins frais, légers et pétillants de nos meilleurs crus de Bourgueil, Chinon et Vouvray que vantait et appréciait en son temps nos grand compatriote François Rabelais.
Je lève mon verre à votre santé et au succès de nos justes revendications.
1920
P. 224
La journée de dimanche a débuté par une assemblée plénière dans laquelle les vœux que nous avons publiés hier, ont été adoptés. À midi un banquet à eu lieu dans la salle des Fêtes de l'hôtel de ville, puis une séance plénière s'est tenue au théâtre municipal.
Le banquet était parfaitement ordonné puisqu'il était réglé par M. Marie, de l'hôtel du Croissant.
Au dessert, M. Ducaud, préfet d'Indre-et-Loire, prend le premier la parole.
Il salue « dans le Jardin de la France » M. le ministre de l’agriculture au nom du département d’Indre-et-Loire.
En termes particulièrement heureux il fait l’éloge des populations tourangelles, laborieuses, courageuses, économes, en majorité agricoles, qui toujours font leur devoir ; n’ont qu’une volonté, produire, produire ; ne connaissent ni le ralentissement, ni arrêt dans leur activité ; sont reconnaissantes au ministre, qu’elles accueillent avec joie, du dévouement et du bon vouloir qu’il leur témoigne et lui savent gré d’accomplir sa tâche si lourde à la satisfaction générale.
M. le préfet termine en levant son verre en l’honneur du chef de l’État qui incarne éminemment les vertus républicaines, la liberté, la solidarité, la patrie et en invitant les convives à se joindre à lui pour adresser à M. Deschanel leurs respectueuses sympathies avec leurs vœux les plus ardents de prompt rétablissement.
M. Camille Chautemps prononce une vibrante allocution dans laquelle il exprime le grand plaisir qu'il a de recevoir au nom de la ville les membres du congrès de l'agriculture.
M. René Besnard exalte avec juste raison le rôle de l'agriculture dans le relèvement du pays, puis il boit aux associations agricoles.
M. Ricard, ministre de l’Agriculture prend ensuite la parole.
Il remercie les représentants de la ville, du département et du Parlement.
Il se déclare très touché des témoignages de confiance qu’il a reçus et qui lui sont nécessaires pour mener à bien sa tâche.
Il est venu à Tours surtout parce qu’il recherche le contact avec les représentants professionnels des populations rurales.
Il dit sa joie de se retrouver dans ce milieu où il voit tant de figures amies parmi les délégués de toutes les régions.
Il félicité les hommes d’action, ces moteurs d’associations si utiles aux agriculteurs, à l’agriculture, au pays !
Je ne peux dit-il, les mentionne tous, mais laissez-moi marquer ma joie de retrouver trois hommes de la première heure.
Jules Gautier, homme de cœur et de talent, l’apôtre infatigable de l’agriculture, le président si actif de la C.N.A.A.
Fernand David qui l’an dernier se trouvait à la tête de la section d’où est sortie la C.N.A.A.
Rappelez-vous, dit le ministre, rappelant les débats qui ont montré les qualités d’intelligence et de conciliation de mon prédécesseur qui fut un grand artisan du premier congrès, où il s’efforça de seconder les efforts des organisateurs.
Des moyens d’action nouveaux ont surgi, qu’utiliseront quantité d’associations adhérentes. La loi du 12 mars réclamée par le premier congrès fortifie tous les syndicats et leurs Union.
Ce fut un œuvre de haute politique républicaine du Parlement qui a confirmé le droit syndical ? cependant il a tenu à marquer qu’il entend que ces libertés, comme toutes les autres s’exercent dans la légalité qui, dans une démocratie est l’expression de la volonté populaire.
Ce n’est pas aux associations agricoles qu’il y a lieu de rappeler ces principes élémentaires.
Le meilleur patriotisme les anime et elles l’ont montré avant la guerre dans leur développement simple mais calme, pendant les hostilités comme soutien moral des populations, depuis le rétablissement de la paix, en suggérant les idées du travail intensif.
C’est donc dans l’intérêt du pays qu’il convient que ce mouvement si magnifiquement ordonné se poursuive. Il est à perfectionner sans cesse, chaque génération apportant sa pierre à l’édifice qui lentement se dégage à travers les siècles.
L’an dernier rappelle le ministre, je vous disais qu’en agriculture, grâce aux matériaux rassemblés par nos devanciers, l’heure était propice à la création d’une C.N.A.A.
Maintenant, il faut travailler à son aménagement progressif. Puisqu’elle doit être l’expression totale des diverses catégories, de l’agriculture, il faut que tous ceux qui participent au travail agricole y trouvent des satisfactions.
Le ministre signale ensuite l’intérêt qu’attache le congrès à la solution des questions qui intéressent les salariés.
Puis il termine :
Continuez à être les ouvriers de cette grande œuvre agricoles qui tend à renforcer l’organisation professionnelle sur des bases larges et équitables.
Je bois à la C.N.A.A. et à toutes les associations agricoles.
Le discours du ministre est chaleureusement applaudi.
Le banquet se termine et l'assistance se transporte au Théâtre Municipal où a lieu l'assemblée plénière qui termine les travaux du congrès.
Après l'exécution de la Marseillaise par l'excellente musique des sapeurs-pompiers, M. Pinguet-Guindon, président de la Société d'horticulture, présente au ministre une charmante jeune fille qui lui remet, au milieu d'une ovation, une gerbe des fleurs du Jardin de la France.
Il est près de 2 heures et demie quand M. Jules Gautier ouvre la séance par un discours excellemment ordonné.
M. Camille Chautemps, au nom de la ville de Tours, prononce un excellent discours où après avoir souhaité la bienvenue aux congressistes il exalte le rôle de l’agriculture et surtout l’entente entre les agriculteurs et les citadins qui seule peut améliorer le coût de l’existence.
M. Henry Girard, secrétaire général, fait le rapport moral sur la C.N.A.A.
Ce rapport est applaudi chaleureusement.
Puis M. Ricard parle d’une question dont l'intérêt dépasse le Congrès : c'est le blé.
Avec des précisions qui dénotent la spécialisation de l’orateur, il expose les vues du gouvernement. La politique du blé est la politique nationale, c’est pourquoi le gouvernement à décidé de donner aux producteurs de blé un intérêt incontestable à intensifier la production du blé.
Cette déclaration est vigoureusement établie.
À 4 heures, M. Ricard lève la séance et repart pour Paris.
***
M. Fernand Laurent, avocat à la cour, directeur de la Liberté, conseiller municipal de Paris, qui est intervenu plusieurs fois au congrès de Tours, est le rapporteur général de l'Union nationale des paysans de France C.G.A.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, mardi 1er juin 1920
p. 225
Le Congrès de l'agriculture
Lundi matin, séance de clôture des travaux du congrès où d'éminents spécialistes ont exposé et fait adopter un nombre considérable de vœux.
La séance est ouverte à 9 heures, sous la présidence de M. Jules Gauthier.
Une question se pose tout d’abord : c’est celle qui a trait aux modalités des votes émis depuis samedi. Cette question après un assez vif débat est solutionnée en spécifiant que seuls les délégués régulièrement mandatés auront droit au vote, mais que tous les adhérents individuels aux prochains congrès pourront y prendre la parole et soutenir les propositions qu’ils auraient à présenter.
M. de Marcillac s’exprime très longuement d’une façon extrêmement intéressante sur les projets d’impôts qui vont frapper l’agriculture et tout d’abord il explique ce qu’il faut entendre par « valeur locative », qui va servir de base aux prochains impôts sur la propriété no bâtie. La valeur locative est le prix brut d’une terre sous la déduction du 5e qui correspond théoriquement aux frais d’exploitation.
M. de Marcillac fait remarquer que le projet soumis au Parlement exonère 5 millions de petites propriétés qui pourraient supporter un impôt proportionnel à leur valeur.
Il expose que dès maintenant la propriété no bâtie supporte un impôt de 3,75 % qui produit 2,5 millions mais qu’on ne tient pas compte de ce fait : que l’agriculture créé la matière imposable et que par cela seul elle devrait bénéficier de quelque faveur.
M. de Marcillac explique ensuite qu’à partir d’un chiffre de base 1 500, la valeur locative sera multipliée par coefficient ainsi fixé : 1 pour les terres labourables ; 3 pour les prairies ; 5 pour les vignes.
Il signale les difficultés d’application de ce régime et demande qu’il ne soit pas appliqué sans la consultation obligatoire des chambres d’agriculture et des professionnels.
Il demande également que l’agriculteur puisse chaque année et normalement faire une nouvelle déclaration d’emploi de ses terres de façon à ce qu’elles ne soient taxées que suivant leur culture.
M. Séguin demande une égale contribution sur les diverses cédules de l’impôt sur le revenu.
M. de Palaminy réclame le vote des coefficients par les chambres d’agriculture régionales.
M. Garcin, du Sud-Est, demande que l’on accorde à l’agriculteur ou au contrôleur des contributions le droit de modifier chaque année sur simple réclamation le caractère des cultures enregistrées précédemment.
La Fédération du Sud-Est demande également que les abattements soient égaux pour toutes les cédules et finalement que le coefficient ne s’applique qu’au-dessus de 1 250 fr.
M. Garcin fait remarque avec juste raison, et d’ailleurs éloquemment que les agriculteurs n’ont jamais refusé de participer aux charges fiscales du pays. Ils sont prêts à travailler au relèvement de la nation comme ils ont été prêts à défendre la France.
M. Garcin s’élève contre un prélèvement prévu sur le capital. Il estime que c’est une très mauvaise opération financière et une pire opération économique.
La réduction du capital qui en serait la conséquence serait la réduction de la production. Ce serait donc une mauvaise affaire surtout pour les agriculteurs.
Il fait voter un vœu contre tout prélèvement sur le capital, prélèvement qui atteindrait d’abord l’agriculture alors que d’autres détenteurs de la fortune publique échapperaient à cet impôt.
Bref il ne faudrait pas « pénaliser l’épargne ».
Ces diverses discussions qui se réfèrent à la 4e section ont été présidées avec autorité par M. Victor Borel, ancien ministre de l’Agriculture.
La 5e section, sous la présidence de M. Riverain (Loir-et-Cher), et par l’organe de M. de Saint-Maurice rapporteur, fait adopter seize vœux que nous publierons demain.
M. Gauthier qui reprend la présidence fait adopter Alger comme lieu du congrès qui aura lieu en avril 1921 sans préjudice d'une réunion qui pourra avoir lieu un peu plus tard dans une ville de la France continentale.
En terminant, M. Jules Gauthier adresse ses remerciements aux congressistes. Il constate que si les discussions ont été vives, elles n'en ont fait que mieux ressortir l'accord final de tous les membres du congrès pour la défense des intérêts primordiaux de l'agriculture.
L'après-midi de la journée de lundi a été consacré à une excursion à Vouvray où les congressistes ont été reçus avec leur amabilité coutumière par Mme et M. Vavasseur.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, mardi 1er juin 1920
p. 225
D'où sort la richesse durable. La Terre et l'Impôt..... Gaston DOUMERGUE
On a beaucoup reproché aux agriculteurs de ne pas payer un chiffre d’impôts en rapport avec leurs bénéfices.
A TRANSCRIRE
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, Mercredi 2 juin 1920
p. 227-228
Le Congrès de l’agriculture
Voici le texte des vœux présentés hier matin par la 5e section du congrès national et qui, sous la présidence de M. Riverain, furent adoptés sur le rapport de M. de Saint-Maurice :
Vœu relatif à la politique du blé.
Les membres du 2e Congrès national de l’agriculture française :
Affirment à nouveau leur volonté de travailler de toutes leurs forces à accroître la production nationale et notamment à développer la culture du blé de manière à supprimer les importations ruineuses pour nos finances ;
Considérant que la culture du blé n’aura en France sa prépondérance désirable qu’autant qu’elle deviendra la plus rémunératrices ;
Demandent :
1° Que le blé soit affranchi de toute taxation au même titre que les engrais, les semences, les instruments agricoles et tous les autres éléments de la production ;
2° Que soit maintenu provisoirement entre les mains de l’État, le monopole de l’importation du blé, dans le but d’assurer en cas de hausse excessive, la régularité des cours, étant entendu que le blé importé pendant la campagne 1920-1921 par l’État ne sera pas cédé à la meunerie à un prix inférieur à 110 francs le quintal ;
3° Qu’une prime de 200 francs à l’hectare soit attribuée aux emblavures de blé, dans les régions libérées de façon à ce que la culture de cette céréale y reprenne une importance au moins égale à celle d’avant-guerre.
4° Que l’orge et le blé, produits du sol national soit largement utilisés dans la panification aux lieu et place du maïs d’importation
5° Que les intérêts des producteurs et des consommateurs sont entièrement solidaires les uns des autres et que méconnaître les droits légitimes des producteurs, comme on l’a fait jusqu’ici, c’est réduire la production et par là sacrifier les intérêts des consommateurs subsidiairement ; que si, pour des raisons reconnues majeures et qui n’apparaissent pas aujourd’hui, la liberté du commerce du blé national – que réclame de Congrès – ne pouvait être accordée, le prix limite de vente, soit fixé par une commission dans laquelle les intérêts de l’agriculture seront largement représentés ; qu’enfin le prix limite de la récolte 1920 ne soit pas inférieur à 110 francs.
Considérant, d’autre part, que le pain constitue l’aliment de première nécessité ;
Conscients du devoir de solidarité nationale qui leur incombe, ils déclarent solennellement ne prétendre qu’à un prix représentant le remboursement de leurs frais de culture sans cesse accrus et une juste et équitable rémunération de leur temps et de leur peine ;
Enfin, redoutant que la spéculation provoque des hausses considérables qui pèseraient lourdement sur la consommation sans profit pour la production,
Demandant instamment au Gouvernement de prendre toutes mesures pour contraindre les intermédiaires à se contenter, comme les agriculteurs, d’une rémunération très modérée.
Vœu relatif aux conditions de livraison du blé
Au cas où les pouvoirs publics persisteraient à adopter un régime spécial pour le blé, le Congrès considérant que la récolte sera très probablement hâtive cette année et que notamment dans les régions méridionales les battages auront lieu fin juin ;
Considérant que depuis les années de taxation les conditions d’achat et de livraison ne sont jamais ni fixées assez tôt ni portées dans les délais opportuns à la connaissance des autorités départementales ;
Considérant que les producteurs éprouvent de ce fait une grande gêne ne trouvant où livrer leur grain dès la moisson,
Considérant qu’il est de l’intérêt national d’accélérer le ravitaillement au moment critique de la soudure,
Émet le vœu que le Gouvernement fasse le nécessaire pour que tous les intéressés sachent dès le 15 juin prochain dans quelles conditions aura lieu la livraison de la récolte,
Et que les conditions de livraison pour l’année prochaine, soient indiquées le plus tôt possible, et en tout cas au plus tard le 30 avril, si des évènements, actuellement imprévus, obligeaient de maintenir la règlementation du commerce du blé.
Vœu relatif à la suppression des prix dits normaux.
Le Congrès de l’Agriculture :
Considérant que le décret Noulens du 31 juillet 1919 a donné lieu à des interprétations très différentes ;
Considérant que les prix normaux ne doivent être qu’une indication aussi exacte que possible de la valeur des denrées chez le producteur, valeur devant uniquement servir de base à la répression des bénéfices exagérés des intermédiaires ;
Considérant que les rares commissions qui existent encore dans sept départements seulement, sont composées en majorité de consommateurs à l’exclusion des producteurs ;
Considérant qu’il est dangereux et injuste de fausser la loi économique de l’offre et de la demande.
Émet le vœu :
Que le décret du 31 juillet 1919 relatif aux prix normaux soit rapporté.
Vœu relatif aux poursuites intentées aux producteurs de lait et de produits laitiers.
Le Congrès :
Profondément ému des conditions dans lesquelles ont été exercées contre les producteurs de lait des poursuites pour coalition ou de spéculation illicite ; considérant que des condamnations sont intervenues sans que les tribunaux paraissent avoir été éclairés sur les conditions de la production.
Émet le vœu : 1° que les parquets soient tenus en pareille matière de prendre l’avis d’experts autorisés avant d’engager des poursuites :
2° Que la loi définisse plus clairement ces délits et établisse en cette matière, la règle de l’expertise contradictoire comme en matière des fraudes alimentaires, de façon à permettre au prévenu de désigner lui-même un expert chargé, concurremment avec l’expert du juge d’instruction, d’éclairer le tribunal sur les conditions de la production.
Charge le bureau confédéral d’appeler la bienveillance du gouvernement sur les suites à donner aux condamnations intervenues à l’effet d’examiner si elles ne doivent pas donner lieu à une remise de peine.
Le Congrès demande instamment à M. le ministre de l’Agriculture d’intervenir de suite auprès de M. le sous-secrétaire d’État du ravitaillement et de M. le ministre de la Justice pour que les poursuites en cours soient immédiatement suspendues.
Vœu relatif à la répression des spéculations illicite.
Le Congrès de l’Agriculture :
Considérant que les parquets et les tribunaux interprètent l’article 10 de la loi du 16 avril 1916 et l’article 419 du code pénal, dans un sens qui dépasse certainement la volonté du législateur ;
Considérant que, d’autre part, les parquets et les tribunaux semblent vouloir méconnaître le droit syndical résultant de la loi de mars 1884 ;
Considérant qu’ils ne tiennent pas suffisamment compte des circulaires du garde des sceaux, qui les invite à consulter, avant toutes poursuites pour spéculations illicites ou coalitions illicites, des commissions compétentes ;
Considérant que les pratiques actuelles constituent un système de répression mal réglé qui est de nature à paralyser l’activité agricole, commerciale et industrielle, à décourager et à éloigner le producteur et le commerçant honnête pour livrer le consommateur au commerce clandestin et peu scrupuleux ;
Émet le vœu :
Qu’en attendant qu’une loi ou un règlement d’administration publique précise rigoureusement les délits de spéculation illicite et de coalition illicite, les circulaires de M. le garde des sceaux deviennent obligatoires pour nos parquets et nos tribunaux.
Vœu relatif à la potasse d’Alsace
Les membres du Congrès :
Considérant que le gouvernement doit prochainement amodier le gisement de potasse alsacien ;
Que deux projets sont en présence, projet de concession unique et projet de lotissement en quatre concessions ;
Que les agriculteurs, intéressés par 90 % de la consommation totale, n’auraient dans une concession unique qu’un part insuffisante et sans influence ;
Que le projet du lotissement en promettant d’attribuer une concession propre aux agriculteurs, représentés par leurs syndicats et associations, répond seul à leurs besoins légitimes, qu’il est du reste conforme aux conclusions et propositions de l’administration technique des mines et donne en même temps satisfaction à tous les autres intérêts en cause :
Émet le vœu :
Que le sulfate d’ammoniaque dû par l’Allemagne, en exécution du traité de Versailles, soit livré directement et au prix de revient aux associations syndicales agricoles, t répartis par leurs soins ;
Que le paiement de ce sulfate d’ammoniaque ait lieu à la livraison et non à la commande.
Vœu relatif à l’intensification de la production et du transport des phosphates et superphosphates.
Le Congrès :
Estimant que l’accroissement du rendement des terrains cultivés est à l’heure actuelle une question primordiale ;
Que l’augmentation de la production est intimement liée à la question des engrais ;
Qu’au premier rang des engrais chimiques figurent les phosphates et les superphosphates ;
Qu’on ne peut penser à tirer ces engrais de notre sol, les petits gisements phosphatiers de l’Aisne, de l’Oise, des Ardennes, de la Somme ayant été ruinés par l’invasion ;
Qu’on ne peut y suppléer comme autrefois par les énormes quantités de scories provenant de nos usines métallurgiques du Nord.
Émet le vœu :
Que l’exploitation de nos gisements phosphatiers de l’Afrique du Nord soit intensifiée ;
Que des moyens de transport soient mis à la disposition des agriculteurs par la création d’une flotte autre que celle postale envisagée par les ministères intéressés ;
Que les avances nécessaires soient consenties à long terme aux agriculteurs de façon que ces derniers ne soient pas arrêtés par cette question d’ordre pécuniaire dans l’œuvre de régénération de notre sol qui est la base du relèvement économique de la France ;
Qu’avant de procéder à toute exportation les expéditions soient faites sur la France jusqu’à satisfaction complète de nos besoins.
Il y a une extrême urgence à ce que ce vœu ne reste pas platonique étant donné que les semailles d’automne sont déjà proches.
Vœu relatif à la concession des gisements du Maroc.
Le Congrès, considérant que les gisements de phosphates du Maroc constituent pour l’agriculture française une matière première indispensable à une production économique du blé.
Émet le vœu :
Que les gisements de phosphates du Maroc ne soient sous aucun prétexte concédés sans que les droits de propriété et de contrôle des agriculteurs français ne soient sauvegardés.
Vœu relatif aux encouragements à la motoculture.
Le Congrès :
« Considérant que l’avenir de la culture du blé dépend essentiellement du développement de la motoculture :
Que dans les circonstances actuelles l’essor de la motoculture ne peut être assuré que par un large encouragement pécuniaire de l’État, et par une interprétation très libérale des règlements en vigueur ;
Que l’arrêté du 26 décembre 1919, en réduisant considérablement le taux des subventions a porté un coup funeste à cet essor dû aux heureux encouragements institués par MM. Fernand David et Victor Boret, ministres de l’Agriculture ;
Qu’une action a été entreprise dès le mois de janvier 1920, au nom de tous les groupements intéressés par la Fédération nationale des syndicats et coopératives de culture mécanique, pour faire connaître et aboutir les désiderata de l’agriculture française :
Considérant que les vœux de cette Fédération, - visant tant à l’abrogation de l’arrêté du 26 décembre 1919, qu’à l’interprétation très libérale des règlements pour la liquidation des demandes de subventions en instance. – ont été adoptés par l’Académie d’agriculture et par les Commissions de l’agriculture du Sénat et de la Chambre des députés ;
Considérant que les démarches antérieures ont eu pour résultat la nomination d’une commission ministérielle permanente instituée par le décret du 26 mars 1920 ;
Émet le vœu :
Que les travaux de la sous-commission chargée de la liquidation des demandes de subventions en instance, aboutissent le plus rapidement possible ;
Que, pour cette liquidation des demandes en instance, les règlements en vigueur soient interprétés de la façon la plus libérale ;
Le Congrès demande également que le carburant pour les tracteurs et moteurs agricoles soit effectivement fourni et par priorité.
Vœu relatif au charbon pour les battages.
Le Congrès de l’Agriculture française émet le vœu ; que les charbons nécessaires aux battages soient distribués en temps utile, en commençant par les régions du Midi qui ont subi les années précédentes des retards préjudiciables à l’intérêt général, les blés de ces régions étant les premiers récoltés facilitent la soudure de l’année.
Vœu relatif à l’unification et à la majoration des tarifs de chemin de fer.
Afin d’éviter que les répercussions prévues par avance, soit par les intéressés, soit par leurs représentants au Parlement, aient des effets encore plus désastreux sur la vie économique du pays, au nom du Congrès de l’Agriculture française, nous demandons au ministre des Travaux publics d’envisager, l’abaissement notable des prix de transport pat chemin de fer, la suppression ou le remaniement des nouveaux tarifs de transport récemment homologués après unification.
Vœu relatif aux avances aux coopératives vinicoles et de sous-produits de la vigne.
Le Congrès ;
Estimant que les pouvoirs publics on le devoir d’encourager la coopération en viticulture,
Émet le vœu :
Que les avances continuent à être accordées comme par le passé et dans la plus large mesure aux coopératives vinicoles et aux coopératives traitant les sous-produits de la vigne.
Vœu relatif à la prorogation des baux ruraux.
Le Congrès de l’Agriculture :
Considérant que la loi du 26 octobre 1919 règle la question de la prorogation des baux ruraux, insiste pour que l’on ne revienne plus sue cette solution définitive.
Vœu sur la limitation de la durée du travail.
Confirmant les décisions prises au Congrès de Paris de 1919 et considérant que l’expérience fait de la journée de huit heures permet de conclure aujourd’hui que cette réforme, réalisée sans précautions suffisantes s’est traduite par une diminution importante de la production, le Congrès de la C.N.A.A. déclare qu’il faut se garder de règlementer la durée du travail agricole, si l’on ne veut pas réduire les récoltes déjà insuffisantes.
Une mesure de ce genre prise dans l’intérêt des salariés agricoles, serait préjudiciable en réalité à la collectivité nationale tout entière et même à ceux qu’elle devrait favorise, car elle élèverait le prix de l’existence en augmentant le prix des denrées. D’ailleurs les exploitations agricoles : propriétaires, fermiers, métayers, et les métayers, et les membres de leurs familles qui travaillent avec eux, lesquels constituent la grosse majorité des travailleurs de la terre, ne veulent pas de la limitation de la journée de travail, et ne demandent qu’à produire le plus possible en fournissant tout l’effort que réclament les saisons, les récoltes et les circonstances particulières à chaque exploitation.
Vœu sur la main-d’œuvre étrangère.
Considérant le vœu émis par le Congrès de la C.N.A.A. ; en juillet 1919, considérant que l’expérience acquise en matière de fixation des conditions d’emploi de la main-d’œuvre étrangère montre la nécessité de modifier les réglementations édictées.
Émet le vœu :
Qu’à l’avenir les conditions du travail de émigrants soient fixées dans chaque région par les représentants des Chambres d’agriculture et des Associations agricoles suivant les diverses modalités d’exploitation et de culture afin que la rémunération de la main-d’œuvre étrangère soit égale et non supérieure à égalité de rendement à la rémunération de la main-d’œuvre nationale.
Que l’administration s’efforce d’accord avec les Associations agricoles de faciliter l’émigration étrangère.
Vœu relatif à la création de centres de réunion dans les villages agricoles.
Le Congrès émet le vœu que des centres de réunion et de vie collective soient créés dans nos campagnes.
Il signale aux Associations agricoles et aux pouvoirs publics l’heureuse initiative prise à ce sujet par l’œuvre « Le Foyer des campagnes » .
Journal d'Agriculture pratique 1920, 10 juin 1920
p. 450-451
LE CONGRÈS DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE
Le deuxième Congrès de l'Agriculture française organisée par la Confédération nationale des Associations agricoles, s'est tenu à Tours du 29 au 31 mai. Préparé avec grand soin par le secrétaire général de la C.N.A.A., M. Henry Girard, il a obtenu le plus grand succès et a été suivi par un très grand nombre d'agriculteurs délégués des Associations agricoles de toute les régions de la France.
Les questions à traiter, fixées depuis déjà longtemps, avaient été étudiées par des rapporteurs dont les conclusions avaient été adressées à toutes les Associations agricoles. Celles-ci avaient donc pu en prendre connaissance avant le Congrès même, et préparer les objections ou les observations que leurs délégués auraient à présenter. C'est là, évidemment, une méthode de travail excellente et qui ne saurait être trop préconisée.
Les travaux du Congrès étaient répartis entre les cinq sections suivantes :
1re section : Comment développer les foyers ruraux. Président : M. Fernand David, sénateur, ancien ministre de l'Agriculture. - Rapporteur : M. Maurice Anglade, président de l'Union des Associations agricoles du Plateau Central.
2e section : Élection et rôle des Chambres d'Agriculture. Président : colonel Mirepoix, président du Syndicat professionnel de Béziers et Saint-Pons (G. C. V.). Rapporteur : M. A. Toussaint, délégué général de l'Union centrale des Syndicats des Agriculteurs de France.
3e section : La participation des ouvriers aux résultats de l'exploitation agricole. Président : marquis de Vogüé, président de la Société des Agriculteurs de France, membre de l'Académie d'Agriculture. - Rapporteur : M. Henri Hitier, administrateur général de la Société des Agriculteurs de France, membre de l'Académie d'Agriculture.
4e section. Les bénéfices agricoles et la participation de l'agriculture aux charges publiques. Président : M. Victor Boret, député, ancien ministre de l'Agriculture. - Rapporteur : marquis A. de Marcillac, président de la Fédération des Associations agricoles du Périgord et du Limousin.
5e section : Questions diverses. La politique du blé. Président : M. A. Riverain, président de la Fédération régionale des Associations agricoles du Centre. - Rapporteur : M. Roger de Saint-Maurice, ingénieur agronome.
Le prochain numéro du journal publiera les vœux adoptés au Congrès en Assemblée générale, à la suite des rapports de chacune des sections.
Une manifestation très nette se dégage des discussions de ce Congrès. Les agriculteurs demandent : le retour au régime de la liberté, la fin du régime de taxation et réquisitions, la fin, une fois pour toutes, de l'ingérence de l'État dans leurs affaires, sous quelque forme que ce soit.
Les discussions dans les sections et aux assemblées générales ont été, à plusieurs reprises, notamment à propos des Chambres d'agriculture et de la politique du blé, extrêmement vives et passionnées. On ne peut s'en étonner, et il est même permis de s'en féliciter comme d'une preuve de la vie et de l'énergie qui animent le monde agricole actuellement.
La municipalité de Tours avait réservé aux congressistes le meilleur accueil et la plus large hospitalité. Il eût été difficile de souhaiter de plus belles et vastes salles pour les réunions que celle de l'Hôtel de Ville, et cependant elles ont été à peine suffisantes pour contenir les congressistes, tant ils étaient venus nombreux.
M. Ricard, ministre de l'Agriculture, présida, le dimanche 30 mai, le banquet qui réunit les congressistes dans la grande salle des fêtes de l'Hôtel de Ville, puis la séance solennelle qui se tint au théâtre municipal.
M. Jules Gautier, président de la Confédération [C.N.A.A.], y prit la parole pour remercier le ministre de l'Agriculture de sa venue au Congrès de Tours, et exprimer en sa présence les principaux desideratas de l'Agriculture française, entre autres la liberté de travailler librement, en supportant sa part légitime des charges fiscales. Faisant allusion à la loi de huit heures, M. Gautier s'est exprimé en ces termes : "Qu'on nous laisse le droit de travailler comme nous voulons, car la nature est une personne qui commande aux hommes et elle veut être obéie. Et puis qu'arriverait-il si les agriculteurs voulaient, comme les exaltés d'autres milieux, faire la grève des bras croisés ?"
M. le ministre de l'Agriculture, dans un éloquent discours à maintes reprises couvert d'applaudissements, traça un vivant tableau de la situation présente de l'Agriculture, rechercha quel devait être l'avenir, et comment il se proposait d'établir une collaboration toujours plus intime entre les représentants élus des organisations agricoles et l'administration.
Enfin, en terminant, il aborda la question qui, à l'heure actuelle, est la principale préoccupation du monde agricole, la politique du Gouvernement dans la question du blé.
L.
RAPPORT MORAL
Journal d'Agriculture pratique 1920, 17 juin 1920
p. 469-471
2e CONGRÈS DE L'AGRICULTURE FRANÇAISE
Rapport [moral] de M. Henry Girard, agriculteur, secrétaire général de la C.N.A.A., sur le mouvement confédéral, lu en séance plénière, au théâtre municipal de Tours, le 30 mai.
Je suis confondu d'honneur qui m'échoit d'avoir à tracer devant vous les grandes lignes de notre action considérable. Si je devais faire œuvre d'orateur, d'avance je me déclarerais défaillant ; mais répudiant tout souci d'éloquence, je désire vous entretenir très simplement des affaires du métier ; c'est ce que j'estime essentiel.
Du métier, j'en suis, j'en suis par hérédité depuis bien plus longtemps que vous ne pensez et la coïncidence est assez curieuse pour que je ma permette d'en dire deux mots. En 1720, il y a deux cents ans, un de mes ancêtres était éleveur à Monnaie, dans le canton de Vouvray, ce beau canton au vin joyeux. Depuis quatre générations ont passé avec chacune 4, 5 ou 6 enfants. Maintenant, cultivateur dans l'Oise, je représente la cinquième génération et nous avons 7 enfants, tous amis des champs. C'est dire que j'ai confiance dans l'avenir de la France, dans la terre, dans la famille et que tout le pousse à défendre de toutes mes forces la cause agricole.
Mes chers collègues,
Vous vous souvenez tous de la fin du Congrès de 1919. Vous avez formulé des vœux nombreux dont il s'agissait de poursuivre la réalisation. Pour ce faire, vous avez institué, sous l'énergique et éloquente impulsion su ministre de l'Agriculture actuel, un lien permanent entre vous, un organe actif, la C.N.A.A.
Je ne puis m'empêcher d'évoquer le souvenir des Vogüé, des Loubet, des Heinrich, des Tisserand, des Fontgalland, des Riverain, des Gavoty, des Viger, des Fernand David, de tant d'autres, venant spontanément et solennellement apporter à la Confédération naissante l'adhésion de leurs groupements. Je ne puis pas ne pas rappeler le mot de notre ami Marcillac à ce moment-là : Un grand acte vient de s'accomplir dans cette assemblée ; nous pouvons dire en sortant de cette salle que l'union absolue de toute l'Agriculture française est faite.
Depuis près d'un an, notre rôle a été de continuer votre œuvre de Paris en intervenant auprès des Pouvoirs publics, en participant à des manifestations, en adressant des communiqués importants aux groupements confédérés.
Au point de vue technique, nous avons eu à agir contre les poursuites intempestives intentées pour hausse soit disant illicite du lait. Désormais, les Parquets ne peuvent entamer d'action sans recueillir l'avis des Offices départementaux. Nous nous sommes faits votre interprète énergique pour réclamer l'amélioration des transports, notamment pour les engrais ; une mesure favorable prise sur ce point a été en quelque sorte le don de joyeux avènement du ministre. L'octroi de carburant pour les tracteurs, le prix de la betterave industrielle, les cessions de sulfate d'ammoniaque d'Allemagne, l'état sanitaire des bovins cédés par ce pays, l'ecimage du blé, etc., ont motivé l'envoi de documents à nos affiliés.
Au point de vue économique, la constitution des Chambres d'agriculture a retenu toute notre attention. Nous nous sommes inquiétés aussi du projet d'impôts sur les bénéfices agricoles et la Confédération a reçu des Commissions d'agriculture de la Chambre et du Sénat un bienveillant accueil. Elle témoigne à tous sa reconnaissance. Elle a insisté victorieusement pour que soit enfin votée la loi portant extension de la capacité civile des Syndicats. Enfin, elle prépare maintenant un rapport sur l'amélioration des conditions du travail agricole en vue des délibérations de la Conférence internationale du travail à Genève au début 1921.
En outre, dans toutes les Commissions, les délégués de la C.N.A.A. ont leur place marquée et nous nous en félicitons.
Dans un ordre d'idées plus général, la Confédération a participé aux manifestations contre les grèves dans les services publics. Au Palais de la mutualité, le 16 mars 1920, notre président, M. Jules Gauthier, dont nul ne sait le travail méthodique, modeste et opiniâtre, a fait entendre la vraie, la grande voix de la terre. À Châteauroux, à Bourges, il est allé nous associer aux assemblées imposantes de la Fédération du Centre. En février dernier, confondant comme il sied la cause nationale et la cause agricole, nous avons fait une très active propagande pour l'emprunt : 50 000 affiches, 400 000 tracts ont été envoyés aux quatre coins du pays.
Nous avons fait de notre mieux, mais nous pourrons faire bien davantage puisque nous devenons de plus en plus puissants, comme le démontre le dénombrement des forces représentées au Congrès. En 1919, nous avions 65 adhésions individuelles et 455 adhésions collectives. Cette année, nous avons environ 80 adhésions individuelles et près de 520 adhésions de groupements. Nous pouvons affirmer que nous sommes mes mandataires dûment qualifiés d'autre moins 2 000 000 de terriens. Or, dans toutes corporation, les Congrès sont les facteurs déterminants de l'activité générale syndicaliste : le résultat obtenu justifie donc les plus beaux espoirs à condition que les éléments unis au Congrès le restent toute l'année par la Confédération.
Trente-huit groupements nationaux ou régionaux nous sont actuellement affiliés et plusieurs demandes sont en instance. Toutefois c'est trop peu si l'on songe que plus de 20 000 groupements à base syndicaliste manifestent leur activité en France, soit un total double de celui des patrons, d'employés et d'ouvriers dans l'industrie et le commerce. C'est trop peu si l'on se rappelle qu'actuellement encore 3 à 4 millions d'hommes vivent de la terre. C'est trop peu enfin si l'on se représente la diversité des régions agricoles et de nos produits.
Il faut donc développer encore l'organisation professionnelle. À la base, multiplions les Syndicats dont tous connaissent les vertus. Quand notre agriculture submergée par l'importation, était dans le marasme, la loi de 1884 a servi à grouper les cultivateurs. Les circonstances actuelles doivent faire se fédérer leurs formations locales en unions régionales.
Des groupements départementaux, si puissants soient-ils, n'ont pas hésité à agir ainsi. Voyez le Syndicat des Agriculteurs de Loir-et-Cher que préside notre si dévoué vice-président, M. Riverain. Il compte 22 000 adhérents, il a fourni 18 millions de francs de produits à ses adhérents en 1919 ; il s'est pourtant agrégé à la Fédération du Centre. Comme le rappelait, l'an dernière, notre ami Ambroise Rendu, l'avenir de l'Agriculture dépendra de la vitalité des religions. En effet, c'est le moyen d'édifier une force purement professionnelle en dehors des cadres politiques. C'est aussi le moyen d'éviter une trop grande prépondérance de la capitale aux dépens des campagnes dont nous revendiquons la place dans la nation. Créons donc de nouvelles fédérations ou bien de nouveaux Syndicats groupant dans toute la France les producteurs de même ordre.
Notre première action sera donc de faire de la propagande, par des conférences, par un tract expliquant notre œuvre confédérale et ses profits. Il vous appartient de faciliter notre tâche en exigeant dans chacun de nos Syndicats la tenue à jour d'annuaires précis nous permettant de nous compter, en ne craignant pas d'indiquer sur la couverture de vos bulletins votre affiliation à la C.N.A.A., en maintenant étroite la liaison avec le Secrétariat général, en publiant dès votre retour au pays vos impressions de Congrès dans nos organes habituels. Nous ne pouvons nous voir souvent ; il faut correspondre. Comme y ont si fidèlement pensé la Beauce, le Périgord et le Limousin, l'Algérie, le Sud-Est et le Sud-Ouest, il faut adresser au siège central le procès-verbal de vos réunions et le texte de vos voeux.
De notre côté, nous nous appliquerons à multiplier les services rendus, soit qu'il s'agisse d'intervenir au nom de toute l'Agriculture auprès des Pouvoirs publics, soit qu'il s'agisse d'élaborer avec vous les mesures que nous réclamons.
Quand aurons-nous, comme l'Union Suisse des Paysans, notre Office central des renseignements sur les prix, notre Office de centralisation des comptabilité agricoles ! Laissons là les lieux communs, ne nous contentons pas des vaines couronnes qu'on nous tresse, poursuivons avec intelligence la poursuite méthodique des réalités. Afin de lutter contre l'insécurité des conditions de la production, demain, tenons des comptes. Ils nous permettront de constituer des dossiers pour informer le public si profondément ignorant des choses de la terre.
Mais pour avoir des résultats, il faut savoir payer et les ressources de la Confédération devront être établies sur une base plus large comme il se pratique partout ailleurs. Notre encaisse est misérable auprès de celle de la moindre force économique de ce pays. Sans vouloir abuser de vos instants en citant ces chiffres, qu'il me soit permis de suggérer qu'en évaluant les contributions selon le chiffre d'affaire des Syndicats, à l'hectare dans les sociétés, Fédérations et et Confédération arriveront à jouer le rôle qui leur est dévolu. La loi du 12 mars 1920 sur les Syndicats nous octroie des libertés dont il faut profiter.
Cependant, plus grande sera notre activité, plus il convient de préciser les principes directeurs que nous devrons observer.
Et d'abord quelle doit être notre attitude à l'égard des grandes forces sociales de l'heure actuelle ?
Nous sommes des travailleurs sans distinction de classes, et nous sommes pour l'ordre sans aller jusqu'à dire que l'ordre social actuel nous donne entière satisfaction, car les ruraux, selon nous, n'y ont pas une place suffisante. Toutefois nous ne voulons pas provoquer l'anarchie avec la prétention naïve ou la fourberie d'être tout dans la nation. N'attribuons pas une vêtue mirifique à des initiales plus ou moins ingénieusement accolées : notre force doit être de fond, non de surface seulement. Estimant que l'air des champs régénère les sociétés aussi bien que les individus, en faisant œuvre corporative, nous assainirons le pays entier.
Vis-à-vis des grands groupements patronaux, nous désirons avoir une attitude correcte sans rechercher d'union intime pour servir d'autres intérêts que les nôtres. Les manières de voir de ces groupements sont trop différents ; les éléments qui les composent représentent une minorité ; nous représentons un monde, le monde des champs où tous se coudoient à la merci du ciel.
Nous ne voulons pas être les serviteurs du Pouvoir, nous ne prétendons pas non plus lui imposer notre loi par la provocation et le désordre. Les insuccès nous prouveront seulement l'insuffisance de notre force. Nous souhaitons l'intime collaboration de tous les serviteurs de la patrie, les techniciens aidant de leurs avis les pilotes chargés de conduire la barque.
De cette collaboration des bonnes volontés, nous devons donner l'exemple aux champs en y développant l'esprit de solidarité. Nos associations ne doivent pas se composer de généraux sans troupes : nos collaborateurs doivent en faire partie à très peu de frais et recevoir des feuilles susceptibles de les renseigner et de les distraire. Il faut savoir annexer aux Syndicats des Coopératives de consommation aptes a accroître le confort rural. Ainsi la bonhommie et la cordialité confédérales entreront de plus en plus dans nos mœurs. Restons unis. Si jamais les malentendus surgissent, pour les régler donnons-nous rendez-vous au pied du monument élevé aux Morts de la grande guerre dans chacun de nos villages. Dans l'atmosphère où flotte à tout jamais leur souvenir, nous sommes certains de nous réconcilier.
Les notions de régionalisme, de solidarité, de nécessité d'améliorer la vie rurale, nous serviront à préparer l'avenir, à aller de l'avant, car nous avons bien plus de positions à prendre que nous n'en avons à défendre ; soyons des constructeurs. Quand il s'agissait de coups de chien, pendant la guerre, on savait bien où trouver les divisions de terriens bretons, vendéens, béarnais, gascons ou alpins. Ils répondaient à l'appel ; qu'ils sachent aussi bien être volontaires au service du métier.
Ces bases générales posée, notre travail prochain vient d'être préparé par vos travaux. Nous aurons à poursuivre la réalisation de vos voeux. Nous ne craindrons pas non plus de prendre contact avec les cultivateurs des pays amis. La Suisse donne l'exemple. Ces jours derniers le Dr Ernest Laur, directeur de l'Union Suisse des Paysans, demandait qu'une action coordonnée soit entreprise dans tous les pays à grandes ressources laitières pour maintenir une situation équitable aux producteurs sur lesquels certains industriels essaient d'exercer une pression préjudiciable. Puisque les ruraux de tous pays sont de ceux qui souffrent davantage des conflits internationaux, ils ne doivent pas être les derniers à se montrer partisans des échanges de vue de peuple à peuple, de praticiens à praticiens. Étant ministre, M. Victor Boret avait institué une Conférence agricole interalliée ; l'idée serait à reprendre.
En effet notre horizon doit toujours s'élargir, s'agrandir comme C.N.A.A. elle-même. Noblesse oblige ! Momentanément, vous m'avez appelé à consacrer mes soins à l'œuvre commune. Comme cultivateur, je puis déclarer que notre plante pousse bien, que arbrisseau devient arbre. Empruntant quelques mots à Claudius Metton, l'auteur plein de cœur d'Un Village syndical, j'ajouterai que je serai bien payé lorsque viendront mes vieux ans, si l'on me dit qu'en nos campagnes les paysans sont plus heureux, si l'on me dit qu'à l'édifice de leur bonheur la faible part que j'apportai, fut utile aux hommes du pays, aux paysans de France.
HENRY GIRARD
1920
p. 472-474
Voeux émis par le Congrès.
Sur les rapports des diverses Sections, la Confédération nationale des Associations agricoles, a émis, en assemblée générale un certain nombre de voeux, dont nous reproduisons ici les principaux.
1re Section
Comment développer les foyers ruraux.
1er Vœu. - 1º Que le testateur ait toujours le droit de laisser à un seul de ses descendants la totalité des immeubles ruraux se rattachant à une même exploitation, sans qu'il y ait lieu de considérer si la valeur du legs dépasse la quotité disponible.
2º Que le testateur puisse spécifier que ses immeubles resteront indivis entre tous ses descendants ou entre plusieurs d'entre eux, l'indivision devant être maintenue si la fin n'en est pas demandée par l'un de ceux qui participent normalement d'une manière effective à l'exploitation du fonds.
3º Que le législateur s'inspire, pour l'application de ces principes, des désirs et des vœux déjà exprimés par les Associations agricoles annexées au présent rapport.
2e Vœu. - 1º Que les Caisses régionales de crédit agricole assurent le plus possible leurs opérations à court terme à l'aide des dépôts qu'elles devront rechercher sur place ou auprès des Caisses d'épargne, de manière que les avances de l'État soient réservées de préférence aux opérations à moyen terme et mieux encore aux opérations à long terme.
2º Qu'elles fassent le plus large usage possible des obligations hypothécaires à ordre ou au porteur pour mobiliser leurs avances.
3º Que le législateur s'efforce de rendre les Sociétés de crédit immobilier utilisables aux agriculteurs : par la suppression de la limitation de l'étendue des jardins ou champs susceptibles d'être acquis, par l'augmentation du maximum de leur valeur, par l'extension de leurs opérations à toutes celles ayant pour objet l'acquisition, l'aménagement, la transformation, la conservation et la reconstitution des petites exploitations familiales.
4º Que pour ces diverses opérations les prêts consentis puissent atteindre 40 000 fr.
5º Que les prêts puissent également être accordés, et ici sans limite au point de vue du chiffre, à tout employeur désireux de construire des maisons paysannes pour les ouvriers qu'il emploie ou ses domestiques de ferme.
6º Que des amortissements spéciaux soient accordés suivant le nombre d'enfants.
3e Vœu. - Que le projet Boret ayant pour objet de faciliter : 1º l'accession des travailleurs agricoles à l'exploitation et à la propriété, avec priorité aux anciens combattants et avantages aux familles nombreuses ; 2º la reconstitution des exploitations agricoles dans les régions dévastées, soit mis en discussion le plus rapidement possible.
Le Congrès fait, au surplus, des réserves sur le droit de préemption accordé aux Sociétés foncières dans la vente de certains biens ruraux et émet le vœu que le Crédit foncier participe à cet effort agraire et s'oriente nettement dans la voie agricole prévue par ses statuts et dans laquelle ses dirigeants l'avaient nettement entraîné.
2e Section. - Chambres d'Agriculture.
1º Que les Chambres d'Agriculture soient régionales, la loi fixant le centre de la région et le nombre de régions, mais laissant aux arrondissements la liberté de s'affilier à telle ou telle région ;
2º Que le nombre de régions corresponde au nombre des corps d'armée, sous réserve pour l'avenir des modifications qui pourraient être apportées au nombre des régions et à la fixation de leurs centres par décret rendu au Conseil d'État, sur la demande des groupements agricoles et des délégués des Chambres d'Agriculture, sans toutefois que le nombre des régions puisse dépasser le nombre de trente ;
3º Que les élections aient lieu au scrutin de liste par arrondissement ;
4º Que le nombre de membres soit proportionnel au nombre des inscrits ;
5º Qu'il y ait égalité entre le nombre d'élus au suffrage universel et le nombre des élus au suffrage corporatif ;
6º Que soient électeurs les ouvriers agricoles domiciliés dans la commune depuis deux ans au moins et y exerçant depuis le même temps, à titre unique ou principal, la profession agricole ;
7º Que puissent nommer des délégués les Sociétés, Syndicats et Associations exclusivement agricoles constitués depuis cinq ans au moins et percevant des cotisations effectives de leurs membres ou ayant des moyens de contrôle équivalents tels que Caisses de Crédit agricole, Mutuelles d'Assurances et Coopératives de production agricole. Néanmoins, les Sociétés, Syndicats et Associations exclusivement agricoles ayant deux ans d'existence le 25 septembre 1919 pourront participer aux prochaines élections ;
8º Qu'en collaboration avec les Associations agricoles existantes, les Chambres d'Agriculture aient mission d'aider et de subventionner les Sociétés agricoles tels que Syndicats, Mutuelles, Coopératives agricoles sans se substituer à elles ;
9º Que les Offices agricoles soient supprimés le jour où les Chambres d'Agriculture entreront en fonction et que les subventions accordées auxdits Offices soient attribuées aux Chambres d'Agriculture.
3e Section. - La participation des ouvriers aux résultats de l'exploitation agricole.
Afin de retenir à la ferme les ouvriers, le Congrès estime qu'il y a lieu d'abord d'assurer aux salariés agricoles des logements convenables pour eux et leur famille avec un coin de terre pour la culture des légumes et l'entretien des petits animaux ; mais en même temps, il apparaît d'une bonne politique d'associer à l'intérêt de l'exploitant, celui de ses collaborateurs. Mais la participation proprement dite aux bénéfices de l'entreprise, déjà si difficile à réaliser dans l'Industrie, présente en Agriculture des obstacles encore plus grands ; elle pourrait même offrir, dans bien des cas, de graves inconvénients.
Pour intéresser le personnel ouvrier aux résultats de l'exploitation agricole, le procédé le plus pratique semblerait être : assurer à l'ouvrier le salaire agricole normal de la région et accorder comme supplément :
1º Une prime à la production (prime par quintal de blé, d'avoine, hectolitre de vin produits, par animal élevé, engraissé) ;
2º Une prime à l'économie (prime du fait de la diminution des dépenses, tant en ce qui concerne les dépenses relatives au matériel qu'en ce qui concerne les dépenses relatives à la main-d'oeuvre, le chef d'exploitation devant, en tout état de cause, rester le maître incontesté de la direction des travaux).
Toutefois, dans un pays comme la France, qui, présente, avec une si grande variété des régions naturelles, une variété non moins grande de systèmes de culture, des modes de faire-valoir, etc., on ne saurait indiquer de formule générale de participation des ouvriers aux résultats de l'exploitation agricole.
Il appartient aux Associations agricoles de chaque région, à chaque agriculteur, d'examiner comment dans son milieu, étant donné les conditions culturales économiques et sociales, la stabilité du personnel peut être assurée par la jouissance d'un logement, d'un coin de terre et la participation aux résultats de l'exploitation peut être réalisée.
4e Section. - Les bénéfices de l'exploitation agricole et la contribution de l'Agriculture aux charges publiques.
Le Congrès déclare : 1º que le régime fiscal appliqué à l'Agriculture doit reposer essentiellement sur une base forfaitaire ;
2º Que la productivité des impôts doit être recherchée moins dans une aggravation des charges ou du taux des impôts frappant la propriété terrienne et son exploitant que dans le développement de la productivité du sol et dans l'accroissement des richesses et de matières imposables qui en découlent.
Qu'au moins pour l'année 1920 soit établi un coefficient moyen pour les domaines de polyculture dont la valeur locative est inférieure à 1 250 fr. ;
Que la faculté soit accordée aux contribuables d'effectuer une déclaration afin de rectifier la désignation de la nature de culture des parcelles assujetties, pareille faculté de redressement étant également donnée au contrôleur sous réserve d'en avertir les contribuables intéressés.
Enfin le Congrès s'est nettement prononcé pour que soit absolument écartée toute taxation, telle que prélèvement extraordinaire sur le capital.
5e Section. - Questions diverses.
Cette section a soumis à l'Assemblée générale un grand nombre de vœux. Renouvelant les desiderata bien souvent exprimés déjà par l'Agriculture, à propos, par exemple, de la suppression des prix dits "normaux " ;
De l'intensification de la production et du transport des phosphates et superphosphate ;
Des encouragements à la motoculture ;
Des garanties à assurer aux producteurs de lait contre les poursuites qui leur sont intentées ;
De la limitation de la durée de travail en agriculture, etc., etc.,
Nous ne pouvons en donner le texte, mais nous devons publier les voeux relatifs à la politique du blé et aux conditions de livraison du blé.
La politique du blé. - Le Congrès demande, :
1º Que le blé soit affranchi de toute taxation au même titre que les engrais, les semences, les instruments agricoles et tous les autres éléments de la production.
2º Que soit maintenu provisoirement entre les mains de l'État, le monopole de l'importation du blé, dans le but d'assurer en cas de hausse excessive, la régulation des cours, étant entendu que le blé importé pendant la campagne 1920-1921 par l'État ne sera pas cédé à la meunerie à un prix inférieur à 110 fr. le quintal.
3º Qu'une prime de 200 fr. à l'hectare soit attribuée aux emblavures de blé dans les régions libérées, de façon à ce que la culture de cette céréale y reprenne une importance au moins égale à celle d'avant guerre.
4º Que l'orge et le seigle, produits du sol national, soient largement utilisés dans la panification aux lieux et place du maïs d'importation.
5º Que les droits des producteurs ne soient pas méconnus ; en effet, les intérêts des producteurs et des consommateurs étant solidaires, sacrifier les intérêts des premiers serait sacrifier ceux des seconds.
Subsidiairement :
Que si, pour des raisons reconnues majeures et qui n'apparaissent pas aujourd'hui, la liberté du commerce du blé national - que réclame le Congrès - ne pouvait être accordée, le prix limite de vente soir fixé par une Commission dans laquelle les intérêts de l'Agriculture seront largement représentés ; qu'enfin le prix limite de la récolte 1920 ne soit pas inférieur à 110 fr.
Considérant, d'autre part, que le pain constitue l'aliment de première nécessité ;
Conscients du devoir de solidarité nationale qui leur incombe, les agriculteurs déclarent ne prétendre qu'à un prix représentant le remboursement de leurs frais de culture sans cesse accrus et une juste et équitable rémunération de leur temps et de leur peine.
Enfin, redoutant que la spéculation provoque des hausses considérables qui pèseraient lourdement sur la consommation, sans profit pour la production, ils demandent instamment au Gouvernement de prendre toutes les mesures pour contraindre les intermédiaires à se contenter, comme les agriculteurs, d'une rémunération très modérée.
Conditions de livraison du blé. - Au cas où les Pouvoirs publics persisteraient à adopter un régime spécial pour le blé, le Congrès émet le vœu que le Gouvernement fasse le nécessaire pour que tous les intéressés sachent, dès le 15 juin prochain, dans quelles conditions aura lieu la livraison de la récolte ;
Et que les conditions de livraison pour l'année prochaine soient indiquées le plus tôt possible, et en tout cas au plus tard le 30 avril, si des événements, actuellement imprévus obligeaient de maintenir la réglementation du commerce du blé.
1920
La Dépêche du Centre et de l'Ouest, 26 juin 1920
P. 266
COMMUNIQUÉS
Une grande manifestation agricole.
À la suite des décisions du 2e Congrès de l'agriculture française, la Confédération nationale des Associations agricoles, ouvre sous la présidence d'honneur de M. J. H. Ricard, ministre de l’Agriculture, une souscription en l'honneur d'Eugène Tisserand, à l'occasion de son élévation à la dignité de grand'croix de la Légion d'honneur et du 90e anniversaire de sa naissance.
Cette souscription conformément au vœu d'Eugène Tisserand sera employé à la fondation de bourses destinées à seconder dans leurs études techniques, les anciens élèves de nos écoles d'agriculture.
Les souscriptions sont reçues par le secrétariat général de la Confédération nationale des Associations agricoles (C.N.A.A.), 55 rue de Bellechasse, Paris (VIIe).
ADIL P. 35
Terre Tourangelle, 6 mai 1926
À PROPOS DES CHAMBRES D'AGRICULTURE
La Terre Tourangelle du 22 avril 1926 a publié un article de mon collègue et ami M. Georges Mahoudeau, intitulé Autour de ma chambre d'Agriculture.
En en prenant connaissance je n'ai pu constater que M. Mahoudeau a tracé d'une main de maître, ce que les Pouvoirs publics entendent par Chambre d'agriculture.
Ceci me rappelle d'ailleurs le Congrès de la C.N.A.A. qui tint ses assises à l'Hôtel de Ville de Tours en mai 1920. Je me souviens des débats qui ont eu lieu, au sein de la Commission, au moment de l'étude sur la composition des futures Chambres d'agriculture.
Ces débats, auxquels prirent part des agriculteurs venus des quatre coins de la France, furent laborieux et en définitive on se mit d'accord sur ceci :
Ces Chambres seraient uniquement composées de cultivateurs exerçant la profession, à l'exclusion des fonctionnaires et des hommes nantis d'un mandat électif, autre que celui de conseiller municipal, de façon à ce qu'elles soient complètement indépendantes.
En assemblée plénière un de nos éminents défenseurs, M. Fernand David présenta les conclusions de la Commission de telle manière que celles-ci furent repoussées, cependant presque aussitôt, l'Assemblée s'aperçut du piège qui lui avait été tendu et se ressaisit, mais M. Fernand David de dire "Messies le vote est acquis, le ministre est arrivé, je lève la séance."
Aussi le lendemain, à la séance de clôture, une protestation énergique, signée de plus de plus de la moitié des délégués, fut présentée. MM. Ferroul du Midi Palaminy du Sud-Est et les délégués de la Corrèze firent entendre de véhémentes protestations, mais MM. Fernand David et Chaumet étaient partis. M. Boret qui présidait, se retrancha derrière ces absences et déclara que l'on ne pouvait revenir en leur absence, sur un vote acquis.
M. de Marcillac, du Plateau Central, pour calmer la fureur des congressistes présents (le mot de scission ayant été prononcé) proposa l'annulation du vote, ce qui d'après lui était la seule chose possible et l'Assemblée adopta cette solution.
De cette façon au lendemain du Congrès nous n'étions pas plus avancé qu'à la veille et les défenseurs des Pouvoirs publics avaient triomphé.
En somme on veut doter les agriculteurs de Chambres d'agriculture tout simplement pour que celles-ci jouent le rôle du tuyau d'échappement dans un moteur à explosion, autrement dit pour réduire à zéro (ou presque) nos revendications.
Reste à savoir maintenant si les cultivateurs, par manque d'énergie, laisseront les Pouvoirs publics, priver plus profondément les chaînes que l'on forge tous les jours aux travailleurs de la terre, ou si dans un superbe élan, il exigeront que l'on respecte les conclusions de la Commission d'étude du Congrès de Tours afin que les Chambres d'agriculture soient composées d'hommes indépendants. Les cultivateurs devront exiger que leurs Fédérations travaillent dans ce sens. L'Union du Lude a commencé, un bon point à l'Union du Lude.
G. RONCIN
Vice-Président de l'Union Fédérative des Syndicats et associations agricoles de Touraine.
1929
Journal d'Agriculture pratique 1er janvier 1929, p. 331-333+
Le XIe Congrès de l'Agriculture française.