État de l’agriculture en France au XIXe siècle

Publié le par histoire-agriculture-touraine

1801

Mémoire sur la manière d'étudier et d'enseigner l'agriculture, et sur les diverses propositions qui ont été faites pour établir en France une grande école d'économie rurale.
Lu à la Société d'agriculture du département de la Seine, en 1801.
par N. François de Neufchâteau , l'un des membres fondateurs de cette Société.
Blois 1827, 111 p.

Sommaire :

Ier. Objet de ce Mémoire : l'étude de l'Agriculture
II. Péril des circonstances où se trouve l'Agriculture en France et dans l'Europe.
III. Divers Livres sur l'Agriculture et de l'insuffisance de ceux des anciens
IV. Des meilleurs ouvrages modernes relatifs à l'Agriculture.
V. Grande Ecole d'Agriculture, proposée par l'abbé Rozier en 1775 et en 1789, et qui devait être placée à Chambord.
VI. Extrait des observations sur Chambord, faites par M. Arthur Young en 1787.
VII. Demande de la concession de Chambord, par N. François de Neufchâteau, en 1801, pour y exécuter plus en grand le plan primitif de Rozier.
VIII. Moyens qui auraient été employés pour l'exécution de ce plan. Note supplémentaire sur ce qui l'a fait manquer. Pièces justificatives, tirées des collections agronomiques de N. François de Neufchâteau

 

1806

Voyages agronomiques dans la Sénatorerie de Dijon, contenant l'exposition du moyen employé avec succès, depuis un siècle, pour corriger l'abus de la désunion des terres, par la manière de tracer les chemins d'exploitation ; avec une gravure et plusieurs pièces relatives à l'objet du Mémoire. Par M. François de Neufchâteau. Volume in-4°. Paris 1806, de l'imprimerie et dans la librairie de Madame Huzard.

1809

Annales de l'agriculture française, Tome XXXVIII (38), Paris 1809.
p. 273-326


RAPPORT fait sur le Concours ouvert par la Société d'Agriculture du département de la Seine, pour faire connaître les Améliorations de l'Economie rurale en France (Lu à la séance publique de la Société le 9 avril 1809) ;
Par M. le Sénateur Comte François de Neufchâteau,  Président le la Société.

1837

Journal d'agriculture pratique N° 3 Première année. Septembre 1837.


Des causes qui ont arrêté le développement de l'agriculture en France.
Lettre à M. de N...., à P....., en Westphalie.
Vous désirez savoir, Monsieur, comment il se fait qu'en France, malgré l'abolition de la féodalité, l'agriculture soit encore si arriérée. Cette question se présente à la plupart des étrangers qui visitent notre pays, surtout à ceux qui habitent des contrées où le système féodal, avec son attirail de corvées, de dîmes et de droits seigneuriaux, pèse sur le malheureux cultivateur.
Il est certain que l'agriculture allemande, par exemple, déjà si supérieure à la nôtre, se trouvait aujourd'hui dégagée de ses déplorables entraves, elle prendrait un essor rapide. Ce qui s'est passé, depuis 1815, dans plusieurs localités de ce pays, et notamment dans le grand-duché de Baden, le prouve suffisamment. Et cependant cette contrée ne jouit pas comme nous d'un territoire étendu et varié, qui ouvre des débouchés à tous ses produits et favorise un commerce intérieur intense.
D'un autre côté, les progrès rapides que l'industrie et les arts ont fait chez nous démontrent assez que ce n'est pas l'aptitude et l'intelligence qui nous manquent.
Les causes de l'état déplorable du premier des arts en France sont très diverses ; toutes ou la plupart ont néanmoins la même origine. La plus ancienne et en même temps la plus puissante de ces causes gît dans le gouvernement même. Pour me comprendre, rappelez-vous, Monsieur, que nous sommes le peuple le plus mobile et le plus impressionnable de l'Europe, et que, tout en nous persuadant que nous imposons une direction au gouvernement, c'est lui qui en définitive nous la donne et qui nous imprime le caractère qu'il affecte. On peut nous comparer, sous ce rapport, à ces maris, plus nombreux en France que partout ailleurs, qui font la grosse voix, tonnent et finissent toujours par se rendre à la volonté de leurs femmes, en se persuadant bien entendu, que c'est la leur qui s'exécute. C'est ainsi que nous avons été successivement galants, grandioses, élégants sous Louis XIV, débauchés sous Louis XV, athées sous la Convention, bigots sous la Restauration.
Or, il exista jadis en France, comme vous le savez, une guerre sourde ou déclarée entre les rois et les grands ; elle éclata surtout sous Louis XI, qui la fit à sa manière. Plus tard, on trouva un moyen plus efficace que de couper des têtes ; ce fut d'attirer et de lier les grands à la cour, de changer, en un mot, ces fiers châtelains, ces vassaux turbulents en humbles courtisans. C'est à Richelieu et à Mazarin que revient l'honneur d'avoir inventé et exécuté ce système dont la première condition était toutefois de dégoûter les seigneurs de vivre à la campagne. On se servit pour cela de l'arme la plus terrible en France, du ridicule. Il fut déversé à pleines mains sur ceux qui persistaient à demeurer dans leurs châteaux, et bientôt le nom de gentilhomme campagnard fut une épithète de mépris que tout le monde voulut éviter. La noblesse en masse déserta ses terres et s'en vint à la cour ou dans les grandes villes de province, et ces hommes, que la crainte des armes n'aurait pu soumettre aux lois, devinrent valets par crainte du ridicule.
Cous comprenez Monsieur, quel effet cela dut avoir sur l'agriculture. Cette industrie formait alors, avec la chasse, la seule occupation des nobles. Comme les rois chassaient également, force était de respecter ce délassement ; mais ils ne cultivaient pas. Le ridicule tomba de tout son poids sur la pauvre agriculture que la désertion des grands propriétaires devait seule déjà ruiner. Bientôt l'exploitation du sol, qui naguère passait, comme aujourd'hui en Angleterre et en Allemagne, pour l'occupation la plus noble et la plus honorable, fut abandonnée à la gente corvéable et taillable, et tomba tellement dans l'opinion publique que le dernier bourgeois aurait cru se déshonorer en devenant cultivateur. Cela devait être ; car, malgré le proverbe, ce sont les hommes qui font la profession.
D'un autre côté on favorisa les villes ; on y attirait le plus d'habitants possible, on y concentrait les capitaux et les talents. Colbert créait presque de toute pièce la fabrique et le commerce français, et dans les encouragements qu'il leur prodiguait, souvent aux dépens de l'agriculture, il semblait oublier ces paroles du plus habile et du plus vertueux ministre que la France ait eu : "Labourage et pastourage sont les deux mamelles de l'Etat."
La révolution n'amena pas grand changement ; le mépris pour l'agriculture était déjà trop profondément enraciné dans la nation pour que la réaction pût être aussi prompte. Les guerres qui suivirent enlevèrent les bras au sol, et, comme toujours, pesèrent principalement sur la culture.
Un homme éclairé, François de Neufchâteau, essaya, vers le commencement de ce siècle, de pousser les gouvernements dans une voie nouvelle, dans la voie de Sully. Le génie de Napoléon lui avait décelé toute l'importance de l'agriculture pour la France ; il était disposé à l'encourager puissamment, à suivre l'impulsion donnée par la ministre, mais le temps lui manqua.
C'est à la restauration qu'il était réservé de commencer une nouvelle ère, non pas qu'elle adoptât un système préférable à celui de ses devanciers, mais par la force des circonstances. Les vieux soldats de Napoléon qui avaient parcouru l'Europe, rentrés dans leurs villages, cherchèrent à y appliquer quelques-unes des méthodes qu'ils avaient remarquées à l'étranger. Des fonctionnaires, des généraux de l'empire, dégoûtés ou repoussés des affaires, se retirèrent dans leurs domaines, et, pour occuper leurs loisirs, se mirent à cultiver. S'ils n'eussent été presque tous dénués d'instruction agricole, ils auraient changé rapidement la face de l'agriculture française. Malheureusement le peu de succès qu'eurent la plupart d'entre eux et leur manière d'exploiter firent considérer leur culture plutôt comme un passe-temps de gens riches que comme une industrie sérieuse. Cependant l'effet moral que produisit la participation de ces hommes distingués à une profession considérée jusque-là presque comme abjecte chez nous eut seul déjà de grands résultats.
Un ministre de la restauration, le duc de Cazes, contribua encore au mouvement progressif qui se faisait sentir alors dans l'industrie agricole. Doué d'un esprit supérieur et surtout d'un grand jugement, il avait entrevu, comme Sully, tout ce que la France devait attendre de richesse et de prospérité d'une agriculture. Il provoqua diverses mesures et entre autres le rétablissement des sociétés d'agriculture dans tous les chefs-lieux de département. Il était à la veille de mettre à exécution des projets plus vastes et plus efficaces encore pour l'amélioration de notre agriculture, lorsqu'il fut éloigné des affaires. Certes, je ne veux pas me faire ici l'apologiste de toute la conduite de M. de Cazes ; mais je crois rendre hommage à la vérité en disant que, des nombreux ministres de la restauration, il est celui qui a montré le plus de zèle et le zèle le plus éclairé pour l'agriculture.
Ses successeurs adoptèrent naturellement une marche opposée. La France eut entre autres le plaisir d'entendre l'un d'eux, M. de Corbière, affirmer publiquement, dans une occasion solennelle, que, si l'agriculture souffrait, c'est qu'elle produisait trop !!!
Plus tard, quelques mesures furent prises cependant en faveur de l'industrie rurale. Malheureusement elles lésaient ou paraissaient léser le commerce et certaines manufactures ; on trouva en outre qu'elles portaient un cachet politique ; à tort ou à raison, on les attribua à la pensée d'une restauration de l'ancienne aristocratie territoriale. Il n'en fallut pas davantage pour susciter contre la pauvre agriculture toute la presse de l'opposition et tout le parti libéral.
Nous sommes encore aujourd'hui sous le poids de cette réprobation qu'on avait soulevé contre nous.
La loi sur les céréales, qui du reste n'a fait en réalité que du bien, celles sur les laines et les bestiaux, qui ont au contraire fait un grand mal, et enfin la loi récente sur le sucre indigènes, en sont la preuve.
Vous voyez, Monsieur, que, contrairement à ce qui s'est passé ailleurs, les divers gouvernements qui se sont succédé en France non seulement n'ont rien ou presque rien fait en faveur de l'agriculture, mais ont encore contribué puissamment à retarder le progrès de cette industrie. Cela ressort d'autant plus clairement que nos localités les plus avancées, le département du Nord, celui du Vaucluse, les deux départements formant l'Alsace, ne sont pas originairement français. Malheureusement le pays ne s'est jamais opposé à cette influence hostile, et aujourd'hui encore, par les derniers motifs mentionnés, la partie la plus éclairée et la plus influente de la nation ne nous est rien moins que favorable.
Le Constitutionnel et une partie de la presse soi-disant libérale ne voient pas encore dans les intérêts de l'agriculture que les intérêts des grands propriétaires. Le peuple pour eux n'existe que dans les villes et les manufactures, et les 20 millions de malheureux qui peuplent nos campagnes ont l'honneur d'être rangés dans l'aristocratie, parce qu'ils possèdent quelques mètres carrés de terrain et une cahutte où le dernier des ouvriers des villes ne voudrait souvent pas loger.
C'est sous ce point de vue qu'ont été traités la plupart des questions soulevées par les droits d'entrée.
Il n'y a du reste rien d'étonnant à cela : nous sommes en France tant soit peu enfants ; pour qu'une chose passe dans notre conviction, il faut qu'elle frappe nos regards. Or, nos écrivains et nos hommes influents habitent les villes ; ils ne peuvent donc pas s'inquiéter du sort des pauvres campagnards.  
La même chose a lieu lorsqu'il s'agit de l'importance comparative de l'industrie commerciale et manufacturière et de l'industrie agricole. Les yeux et l'esprit sont éblouis à la vue d'une fabrique ou d'un port commerçant. Cette activité, ce bruit, ce mouvement, ces machines puissantes qui aident et remplacent la force de l'homme, tout cela frappe d'étonnement ; cela laisse dans l'esprit une haute idée sur l'industrie qui provoque l'emploi de tant de forces. Que peut offrir en compensation la pauvre et modeste agriculture ? une mauvaise charrue, traînée par quelques bêtes plus ou moins chétives, dirigée par un paysan sale, mal vêtu, grossier ! Nous sommes d'ailleurs trop ignorants pour pouvoir défendre nos droits contre nos rivaux par des écrits et trop pauvres pour pouvoir en user, en faveur de notre industrie, de l'influence des pompes et des fêtes. A la vérité, la fabrique ou le port qu'on admire n'occupent qu'un espace très limité ; le nombre en est restreint. Il en est de même de celui des ouvriers qui, pour un maigre salaire, viennent y vendre leur travail, leur santé, presque toujours leur moralité ; tandis que d'innombrables charrues sillonnent le sol de la France, tandis que 25 millions d'hommes sur 33 vivent de l'agriculture ; tandis enfin que notre atelier à nous cultivateurs, c'est la France, la France tout entière, depuis Bayonne jusqu'à Lauterbourg, depuis Antibes jusqu'à l'extrémité du Finistère. Mais tout cela est disséminé ; on n'en voit que des parcelles qui n'ont rien d'attrayant. Pour qu'on l'appréciât, il faudrait que cela fût réuni. La vue de 900 milles charrues suffirait je pense, pour donner sur l'importance de l'agriculture une idée différente de celle qui domine aujourd'hui. Que serait-ce si l'on y ajoutait les bestiaux et les hommes ? L'industrie avec toutes ses merveilles, le commerce avec tout son éclat, paraîtraient sans doute bien chétifs en comparaison. Malheureusement notre atelier est trop vaste pour que cette réunion puisse avoir lieu.
Je viens de toucher ici à l'origine des causes qui ont influé sur l'état de notre agriculture, à cette légèreté, à cette futilité, au manque général de jugement qui caractérise la nation française. On prétend, je le sais, qu'aujourd'hui les Français sont bien changés, qu'ils sont devenus graves et posés. En effet, nous discutons beaucoup plus sérieusement, mais nous ne discutons pas beaucoup mieux qu'autrefois. Nous jugeons toujours avec aussi peu de réflexion ; la forme emporte toujours le fond, une phrase bien dite est encore pour nous une phrase bien pensée. Nous manquons, en un mot, de ce bon sens que nommerai pratique, que l'on remarque dans toutes les classe de la société en Allemagne, en Angleterre, en Belgique, qui guide ces peuples si admirablement dans les grandes comme dans les petites choses, et qui leur fait repousser les sophismes et les paradoxes, quels que bien dits qu'ils soient. Ce bon sens pratique est, après la moralité, la première vertu d'un peuple ; c'est l'ouvrier ; les autres qualités ne sont que des matériaux.
Que produisent, en effet, l'activité, le courage, l'esprit même, sans le jugement ? Notre état politique s'est ressenti, d'une manière funeste, de ce défaut national. Ce défaut explique à nos yeux les évènements bizarres, les commotions imprévues, les bouleversements inouïs qui figurent si fréquemment dans l'histoire du pays.
Il n'est pas nécessaire de vous développer longuement, Monsieur, l'effet du caractère national sur notre agriculture. Non seulement il a empêché que cette industrie fût appréciée chez nous à sa juste valeur et encouragée par des moyens convenables, mais encore il a grandement nui à son développement en aveuglant et en rendant inabordables aux idées progressives ceux qui l'exploitaient, tandis que d'un autre côté il égarait dans des théories inapplicables les hommes instruits qui ont voulu s'en occuper.
L'art agricole n'exige pas seulement des connaissances variées ; il demande surtout un grand fond de jugement, d'esprit d'observation et de persévérance. Or, ce sont trois choses aussi rares dans notre beau pays de France que l'esprit y est commun. Les paysans belges, allemands, anglais, comme nos Flamands et nos Alsaciens, ces hommes lourds, flegmatiques, grossiers, qui au premier abord semblent si inférieurs aux Français, observent et réfléchissent, écoutent les indications utiles, et, grâce à leur gros bon sens, saisissent presque toujours les choses sous leur véritable point de vue. Le paysan français, vif, spirituel, intelligent, répond à l'exemple comme au précepte : "Si c'était bon, nos pères l'auraient fait depuis longtemps ; " ou : "Ça peut être bon, mais ce n'est pas la coutume chez nous," et, fort de ces arguments, il repousse d'emblée les améliorations les plus évidentes. Si plus tard il les adopte, je crois que c'est bien moins parce qu'il est convaincu de leur avantage que parce qu'il s'est habitué à les voir.
Notre caractère national est donc anti agricole. Dans un pareil état de choses et en suivant rigoureusement les idées de nos économistes modernes, il faudrait abandonner l'agriculture et devenir exclusivement commerçant ou manufacturier. Malheureusement, cela ne se peut ; dans tous les pays, mais surtout en France, l'agriculture est et sera toujours la base de toutes les industries. On a beau faire ; le commerce et les manufactures subissent et subiront constamment chez nous l'influence toute puissant de l'agriculture et prospèreront ou péricliteront avec elle. Prétendre, suivant le système de Colbert, développer les industries isolément, c'est vouloir élever un édifice et le raffermir sans en augmenter les fondations. Tous les jours les faits viennent nous le confirmer à notre détriment ; la propriété commerciale et manufacturière d'un pays, lorsqu'elle n'a pas l'agriculture pour soutien, est une misère badigeonnée ; c'est un corps monté sur des échasses et que la moindre commotion renverse. Telle est, jusqu'à un certain point, notre situation.
Il faudrait donc que le gouvernement en France, s'occupât, plus encore que ne le font les gouvernements étrangers, de favoriser par tous les moyens possibles le développement de l'agriculture. Or, vous avez pu voir, Monsieur, par ce qui précède, que c'est précisément le contraire qu'il a fait jusqu'à présent. La féodalité règne, il est vrai, chez vous, Monsieur ; mais votre aristocratie et même nos princes s'occupent depuis longtemps d'agriculture avec zèle et intelligence. Joseph II ne craignit pas jadis de prendre une charrue des mains d'un paysan et de tracer devant tout sa cour plusieurs sillons avec le noble instrument, comme il l'appelait. Votre grand Frédéric faisait à cette époque explorer toute la Prusse pour y découvrir de la marne ; il essayait lui-même, dans ses domaines de la Marche de Brandebourg, le système pastoral mixte, qui depuis a fait la richesse de cette contrée. Enfin des cours de caméralistique et d'économie agricole, établis dans toutes vos universités, procurent à vos hommes d'état des notions justes sur l'agriculture et l'économie politique. Tout cela manque chez nous, et, qui pis est, on ne se doute pas seulement pas que cela soit utile. Je dois cependant convenir qu'aujourd’hui il y a quelque apparence d'amélioration. Sur la proposition du gouvernement, la Chambre des Députés vient d'augmenter notablement le fonds destiné à l'encouragement de l'agriculture. Nous sommes, sous ce rapport, presque au niveau du Théâtre-Italien de Paris ; il ne s'en faut que de 100 000 francs, et réellement nous pouvons être fiers que notre industrie ait acquis aux yeux de l'administration une importance presque égale à celle des Bouffes.
Malgré l'exiguïté de cette somme, comparée aux objets auxquels elle devra s'appliquer, elle est suffisante pour le moment ; peut-être même eût-il été fâcheux qu'elle fût plus forte dès le début. Tout dépend aujourd'hui de la distribution de ces fonds, et il faut savoir gré au ministre de ce que, sentant qu'il n'était pas agriculteur, il ait cherché à connaître l'opinion des conseils généraux et des sociétés d'agriculture sur cette question. Puisse-t-il s'être bien adressé !
Si les mesures que lui et ses successeurs provoqueront peuvent contribuer efficacement à répandre l'instruction agricole parmi les masses ; si elles parviennent à attirer et à diriger vers la carrière de l'agriculture une portion des classes riches et instruites, alors j'ose croire, Monsieur, que, si dans vingt ans j'ai encore le plaisir d'être en correspondance avec vous, je n'aurai plus le chagrin d'y lire la question que vous m'avez adressée dans votre dernière lettre, et à laquelle j'ai tâché de répondre aussi bien qu'il m'a été possible.
Agréez, etc.
JULES BRAME.
 

Publié dans Etat de l'Agriculture

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