SAVIN de LARCLAUSE (père) Pierre Agénor (1797-1852)

Publié le par histoire-agriculture-touraine

1853

Nécrologie

Annales de l'agriculture française, T1, 1853.
p. 162-163
NÉCROLOGIE. - SAVIN DE LARCLAUSE.
Pierre-Agénor Savin de Larclause abandonna, en 1830, le parquet, où il s'était acquis une réputation fort honorable, pour s'adonner exclusivement à sa passion de l'agriculture. Le jeune procureur du roi se fit homme des champs. Etabli dans le domaine de Monts qu'il venait d'acquérir, il déploya tant d'activité et sut appliquer si bien cette science agricole dont il connaissait tous les secrets, qu'en peu de temps il en fit la terre la mieux cultivée, la propriété la plus remarquable de tout le département.
Chaque année, une récompense nouvelle venait encourager ses efforts et couronner ses succès. En 1839, la Société royale et centrale d'agriculture, lui décernait une médaille d'argent pour sa bonne culture ; en 1842, elle récompensait ses progrès par une médaille à l'effigie d'Olivier de Serres. En 1841, la Société d'agriculture de Poitiers lui donnait une première médaille d'or pour la collection et la taille de ses arbres fruitiers ; en 1843, une deuxième pour l'étendue et la richesse de ses prairies artificielles ; en 1848, une troisième pour l'ensemble remarquable de ses cultures : tandis que, de son côté, l'association agricole de l'Ouest, lui décernait, en 1842, la première médaille d'argent, et en 1846 la première médaille d'or. A l'exposition nationale des produits de l'industrie agricole et manufacturière, Savin de Larclause obtint, en 1849, une médaille d'argent, et peu avant sa mort il recevait de M. le ministre une médaille (prix de 4 000 francs) pour moyens préservatifs de la maladie des pommes de terre. Chacune de ces sociétés d'agriculture s'honorait de le compter parmi ses membres. L'association agricole de l'Ouest l'avait choisi pour son vice-président, et, lorsque furent créées les chambres consultatives, tous les agriculteurs du département le nommèrent à la présidence, où l'appelaient, à tous les titres, ses services rendus. Apôtre des doctrines de Jacques Bujault, dont il était l'élève et le vieil ami, Savin de Larclause se plaisait à les prêcher dans ces publications où nous retrouvons jusqu'au style de maître Jacques, si bien que plus d'une fois l'âme de Frank a dû tressaillir en entendant à la veillée, autour du foyer domestique, la lecture de l'Almanach du cultivateur. Réunis ensemble, ces fragments, qui traitent tour à tour des assolements, des bons labours, des prairies artificielles, de la culture du colza, des arbres fruitiers, etc., forment un cours complet d'agriculture pratique, riche en science, fécond en préceptes, véritable catéchisme du laboureur. Venez dans mes champs, disait Savin de Larclause aux entêtés et routiniers, venez, mes amis ; vous y trouverez la preuve de mes paroles. C'est qu'en effet il prêchait par l'exemple, et par les faits convainquait les plus incrédules. Aussi nul mieux que lui n'était apte à diriger une ferme-école. Ses cours étaient faits avec la science et le style coloré de son divin maître. Quittant la théorie pour la pratique, il mettait la main à la charrue, savait conduire le semoir et manœuvrer l'extirpateur. C'est lui qui taillait tous les arbres de ses vergers, expliquait pourquoi il laissait telle branche et coupait telle autre, sacrifiant, quand il le fallait, le fruit à l'arbre, et apprenant à ne jamais désespérer de ses produits. Et c'est dans la fleur de l'âge, au milieu de ses travaux, que la mort est venue le surprendre, enlevant au département le plus noble fleuron de sa couronne agricole, aux élèves de la ferme un chef qui était un père, à tous ceux qu'il affectionnait un véritable ami. Appelé à recueillir son héritage, M. Fontaneau, son gendre, suivra la route que son beau-père lui a si dignement tracée ses connaissances spéciales, son goût et ses études sérieuses de l'agriculture lui rendront cette tâche moins difficile ; et puis il aura, pour seconder ses efforts, tout le concours du jeune Henri Savin de Larclause, que son pauvre père avait élevé pour qu'il lui succédât un jour, et dont les succès à la ferme de Belplas [Ferme-école ouverte en 1847, commune de Villsavary, arrondissement de Carcassonne, département de l'Aude) et à l'institut agronomique de Versailles sont les plus précieuses garanties pour l'avenir de la ferme-école de Monts.
Grissot de Passy,
ingénieur des ponts et chaussées.
 

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