Race ovine : ILE-DE-FRANCE

Publié le par histoire-agriculture-touraine

DENIS Bernard, L'Ecole vétérinaire d'Alfort et le mouton Mérinos. Bull. Soc. Méd. Sci. Vét., 2007, 7 : 94-103.

Extraits : 

p. 99
"L'intérêt du troupeau d'expériences d'Alfort fut encore conforté par l'introduction du mouton anglais Dishley, création du célèbre Bakewell, qui nous concerne parce qu'il sera un peu plus tard croisé au mérinos. C'est un rapport rédigé en 1820 par Victor Yvart à la suite du voyage en Angleterre, qui réattira l'attention sur les races anglaises spécialisées dans la production de la viande qui et suscita un engouement rapide et excessif des milieux agricoles lesquels demandèrent à l'Administration d'en introduire en France. Celle-ci continuait à considérer que le Mérinos répondait bien aux besoins du pays et se contenta d'aider quelques éleveurs à procéder à des introductions privées de moutons britanniques. C'est sans doute à ce moment-là que l'Ecole d'Alfort fit l'achat modeste de trois animaux anglais. Des recherches avaient été ébauchées une vingtaine d'années plus tôt [1800] par Flandrin sur les races à laine longue. Il apparut néanmoins vite nécessaire que l'administration se charge des expériences d'acclimatation et de croisement avec les races françaises, et l'Ecole d'Alfort apparut comme étant la plus propice pour cela. Auguste Yvart, dont nous parlerons dans un instant, partit en Angleterre en 1833 pour y acquérir 6 béliers et 62 brebis de grande qualité, qui constituent la souche initiale des nombreux béliers qui seront utilisés ultérieurement en croisement, ça et là, pour améliorer nos races autochtones. Notons que ces animaux furent, à Alfort, entretenus selon le système anglais : pâturage toute la journée et rentrée le soir dans des cours pourvues de hangars ouverts à toutes les époques de l'année.
On se doute bien que les capacités fourragères du domaine d'Alfort étaient limitées. C'est pour cette raison que les premiers bovins Durham introduits officiellement en France furent transférés d'Alfort au Pin [Orne] ; c'est elle également qui sera responsable en 1842 du transfert du troupeau ovin, composé alors de purs Dishley et de Dishley x Mérinos, dans le Pas-de-Calais, à la Ferme de Montcavrel."
 

p. 100-101

"Edmond Quittet nous rappelle d'ailleurs que du Mauchamp est intervenu dans les croisements Dishley x Mérinos. Outre ses travaux sur le Mérinos, Auguste Yvart s'intéressait de plus en plus au Dishley, compte tenu de l'intérêt grandissant des agriculteurs pour la production de viande. Pour lui, il ne s'agissait nullement d'abandonner le Mérinos mais de lui conserver ses qualités lainières tout en le dotant d'un bonne conformation bouchère. La vieille idée d'une opposition entre les deux aptitudes disparaissait dès lors que les animaux étaient bien alimentés. On connaît la célèbre expression "emballer un Dishley dans la peau d'un Mérinos" pour résumer ses objectifs. Les premiers résultats obtenus à Alfort étaient prometteurs. Selon Mauguin, "les croisements judicieux qui s'y exécutaient permettaient d'espérer que l'on parviendrait à créer une race française également appropriée aux besoins de l'industrie manufacturière at aux spéculations de l'engraissement". Yvart en était convaincu et, souhaitant par ailleurs que des croisements soient également effectués avec une autre race anglaise, la New-Kent, il décida l'Administration à donner une dimension nouvelle à ses travaux, et c'est alors que le troupeau d'Alfort fut transféré dans le Pas de Calais, sous un climat proche de celui de l'Angleterre, et dans une région riche en manufacture qui utilisaient de la laine longue anglaise. Le troupeau revint à l'Ecole de Grignon en 1879. D'abord, d'abord appelé "race d'Alfort", puis "Dishley-Mérinos", puis "race de Grignon", il devait finalement devenir "Ile de France" en 1922."
 

1921

Larousse agricole Tome 1, 1921, p. 484

Dishley-mérinos (Race ovine)
On donne ce nom à la population ovine obtenue par la multiplication inter se des métis provenant du croisement du mouton dishley et du mouton mérinos [Mérinos de Mauchamp]. Yvart, qui avait importé et fait connaître en France le mouton de Leicester, amélioré et rendu précoce par Bakewell à Dishley-Grange, commença, vers 1830, dans une ferme annexe de l'École vétérinaire d'Alfort, les premiers croisements dishley-mérinos, dans le but d'obtenir un mouton à croissance rapide, donnant beaucoup de viande en peu de temps et possédant également une toison lourde et de bonne qualité. Le troupeau d'Yvart, transporté plus tard à Haut-Turgy (Somme), a été ramené en 1879 à l'École de Grignon, où il existe encore. 
D'autres éleveurs : Pluchet à Trappes (Seine-et-Oise), Pélat à Brébières (Pas-de-Calais), poursuivent le même but et avec assez de succès pour que le Dishley-mérinos se soit répandu dans beaucoup d'exploitations de Picardie, d'Ile-de-France, de la Brie et du Perche.
Sanson a beaucoup reproché aux dishley-mérinos de ne pas constituer une population ovine homogène et il en a conclu qu'il était impossible de constituer une race par métissage. En réalité les éleveurs qui ont fait le dishley-mérinos n'ont pas toujours eu la volonté d'obtenir un type bien défini quant à l'étendue de la toison et aux autres caractères extérieurs. Par contre, l'emploi des béliers dishley-mérinos a permis de donner de la précocité dans beaucoup de troupeaux mérinos, d'augmenter le poids des animaux sans diminuer le poids des poisons, que les marchands de laine paient sensiblement aussi cher que celles de laines fines.
Caractères. Bien que les dishley-mérinos ne soient pas complètement homogènes, en raison des différences d'orientation poursuivies par les éleveurs, ils possèdent tous les caractères suivants : animaux de grande taille (les béliers pèsent 100 à 120 kg) ; têtes sans cornes, à orbites saillantes, oreilles horizontales ; encolure courte, à fanon réduit, sans plis, tronc ample, dos et reins larges, gigot très développé ; membres postérieurs forts. Toison uniformément blanche, pesant en moyenne 4 kg, ouverte en mèches non bouclées, laine plus finement ondulée et n'ayant pas le brillant soyeux de celle du dishley. L'étendue de la toison présente des variations importantes ; on considère comme ayant fait retour au dishley les sujets qui ont la tête nue jusqu'au oreilles et comme ayant fait retour au mérinos ceux qui ont de la laine sur le chanfrein et les joues. 
Aptitudes. Le dishley-mérinos est un mouton réunissant un très haut degré d'aptitude à la production de la viande et à celle de la laine ; il convient dans les pays à cultures riches pouvant en toutes saisons l'alimenter copieusement. Dans ces pays, il est utilisé pour la production d'agneaux gras très précoces vendus pour la boucherie à 8 ou 9 mois et pesant 40 à 50 kg.
 

 

1960

BOUHIER DE L’ÉCLUSE Robert (Ingénieur agricole), Pratique de l’élevage du mouton. Encyclopédie paysanne, Flamarion, 1960, 177 pages.

p. 23-25
II. Races à viande 
Ile-de-France 
Standard :
Taille : race lourde et précoce 
Tête : forte, large au niveau du crâne, sans cornes, orbites en saillie, face de longueur moyenne, lèvres et nez un peu épais. 
Profil : droit ou très légèrement busqué chez le bélier, chanfrein arrondi transversalement. 
Oreille : grande, horizontale ou légèrement dressée, jamais tombante, couverte de poils fins et courts.
Nuque : large.
Encolure : courte, tronconique, arrondie à son bord supérieur, bien fondue avec les épaules, sans gorge, sans fanon, sans plis ni cravate.
Tronc : ample et long.
Poitrine : ouverte et descendue, sternum proéminent. 
Côtes : rondes, dessus (dos et reins) droit et large.
Croupe : horizontale et longue, queue attachée haut, cuisse musclée. 
Gigot : descendu et bien développé tant dans sa partie interne que dans la région de la fesse.
Ventre : légèrement arrondi, jambes tombant, flancs courts. 
Membres : courts avec aplombs réguliers, jamais long-jointés les postérieurs avec un jarret fort mais bien vertical, jamais fermé, ni la pointe renvoyée en haut, ni clos, ni trop ouvert.
Toison : étendue, couvrant le haut de la tête jusqu'à une ligne passant par les orbites ou légèrement dessus, garnissant les ganaches et le bord supérieur des joues, s'arrêtant aux membres inférieurs à quelques centimètres au-dessus du genou, revêtant la poitrine et le ventre, laissant ou non les testicules à découvert, descendant au membre postérieur jusqu'au jarret, en recouvrant les parties supérieures et latérales de celui-ci et le haut du tendon en arrière. L'aspect général est celui d'une toison assez courte. Laine fine, souple, onctueuse, pourvue d'un suint abondant, de couleur jaunâtre. 
Durant leur première année, les jeunes peuvent avoir une laine courte sur les joues, le chanfrein, les membres postérieurs et, chez les jeunes béliers, sur la peau des bourses.
Couleur : blanche, tête et membres couverts de poils fins, de coloration blanc-argenté, sans reflets ni taches rougeâtres, brunâtres ou autres. Les taches noires, même de petite étendue, sur le corps et les membres ne sont pas tolérées. 
L'absence de toute tache de pigmentation noire aux lèvres, au bout du nez, aux paupières et autres muqueuses (anus, vulve, périnée, cavité buccale) est désirable ; cependant la présence desdites taches n'est pas une cause de disqualification. 
Causes de disqualification : présence de cornes, toison envahissant la face ou le membre postérieur, ou ces deux régions chez les adultes, toison laissant la tête complètement nue ; toison ouverte en mèches pointues vrillées à l'extrémité, à brin gros, dur, sec, cassant, oreilles minces, petites et transparentes, entièrement dégarnies de poils.
Caractères à rechercher : chez le bélier, la nuque large, le dos droit et épais, le membres écartés, surtout les postérieurs, et bien d'aplomb, les testicules réguliers et peu descendus, le sillon des bourses peu marqué, la tête bien portée, l'expression éveillée, la toison homogène. Chez la brebis la face longue, les lèvres épaisses, les membres fins, surtout les antérieurs, la mamelle globuleuse et régulière, les hanches écartées, la croupe longue.


Flock-book créé en 1921, le plus important de France (plus de 80 adhérents). Issu d'un croisement Dishley-Mérinos aujourd'hui bien fixé, l'Ile-de-France est un mouton précoce, exigeant, à la laine assez fine, de qualité moyenne AB (3 à 4 kg par brebis) réputé pour la production de viande. Il représente le 1/12 du cheptel français (un million de têtes). Chaque troupeau produit un pourcentage intéressant d'agneaux doubles. C'est un animal de bergerie, mais il existe encore quelques troupeaux de plein air. 
Aire de répartition : Brie, Beauce, Soissonnais, Gâtinais, etc. Italie, Suisse, Pologne, Allemagne, Afrique, etc.

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